A propos des séries de température du « Met Office Hadley Centre »

Par MD

Plusieurs institutions fournissent des séries chronologiques de températures relevées par des stations terrestres ou des points de prélèvements océaniques. Parmi celles-ci, on peut citer notamment :

  • Le Goddard Institute de la NASA qui publie les séries GISTEMP (du GISS de la NASA)
  • Le Hadley Center qui est la principale institution de climatologie et météorologie au Royaume Uni.

Deux organismes enregistrent en continu les données sur la température qui règne dans l’atmosphère à différentes altitudes à partir de mesures effectuées par les satellites dédiés de la NASA et par des ballons sondes lâchés dans l’atmosphère :

  • Le RSS (Remotesensing system) est essentiellement financé par la NASA
  • L’UAH (Université de l’Alabama, Huntsville)

Nous nous intéresserons ici aux séries publiées par le Hadley Center britannique

1/ Les « anomalies » de températures

Les relevés de températures publiés ne représentent pas les valeurs absolues des températures mais les écarts par rapport à une moyenne relative à une époque antérieure. Ces écarts sont baptisés “anomalies ”

Nous revenons ici sur les conditions de leur élaboration en prenant comme exemple les séries publiées par le Hadley Center britannique (dans la suite, abrégé en Hadley) en collaboration avec la Climate research unit (CRU). Ce sont les plus longues séries agrégées au niveau mondial, qui couvrent une période 1850-2019 et sont très fréquemment utilisées comme références, à savoir :

  • CRUTEM4v pour les terres émergées,
  • HadSST3 pour les océans,
  • HadCRUT4 (combinaison des deux précédents [1]) pour l’ensemble du globe.

Les données correspondantes sont mises à jour mensuellement, immédiatement accessibles sur leur site dédié.

Hadley représente souvent ces séries sous une forme graphique devenue familière, dont nous reproduisons ci-dessous un exemple et que nous retrouverons par la suite.

HadCRUT4 : anomalies de température (°C)

Le zéro des ordonnées représente la moyenne des températures annuelles observées sur la période trentenaire 1961-1990, que Hadley prend comme référence. Le terme d’ « anomaly » est parfois critiqué, car il présuppose que la période 1961-1990 serait la « normale », ce qui est évidemment conventionnel. On utilisera désormais ce terme faute de mieux (en omettant les guillemets…)

Le fait de repérer la série chronologique de températures par rapport à une valeur zéro conventionnelle (et non au 0 °C) revient à opérer une simple translation, qui n’altère nullement la forme de la courbe.

La même convention peut être appliquée à toute série de températures quelles que soient sa situation et son étendue géographique. On efface ainsi les disparités considérables des températures enregistrées à la surface du globe pour ne conserver que les évolutions dans le temps, qui peuvent alors être comparées et moyennées.

2/ Le découpage de la surface du globe.

Hadley découpe le globe terrestre en quadrilatères sphériques de 5°x5° de latitudes / longitudes, soient 2 592 éléments (36×72). Le planisphère suivant (source) illustre le découpage des surfaces océaniques.

Anomalies de températures de surface de mer (SST)

Pour chaque élément, on détermine l’anomalie de température. Les anomalies globales sont obtenues en faisant la moyenne pondérée des anomalies de chaque élément (pondération par les superficies élémentaires, c’est-à-dire par les cosinus des latitudes moyennes). Enfin, les anomalies sont regroupées en séries chronologiques.

3/ La série CRUTEM4v des températures des terres émergées.

Hadley a sélectionné 4 840 stations de référence réparties sur tous les continents (dont 25 stations en France), caractérisées par l’ancienneté, la stabilité des sites et la continuité des observations.

Les durées d’observation vont de 300 ans pour la plus ancienne (De Bilt, Pays-Bas) à quelques décennies pour les plus récentes. En 1850 (origine des séries), on ne disposait que de 170 stations, dont seulement 3 dans l’hémisphère sud. En 1900, il n’y avait encore qu’environ 1 980 stations. Il faudra attendre 1950 pour commencer à avoir un nombre vraiment significatif de stations, comme l’indique le graphique ci-dessous :

Nombres cumulés de stations selon l’année de début des observations

Comme on connait les coordonnées géodésiques des stations, on peut établir les diagrammes suivants (à la maille de 10°x10° pour la lisibilité) qui donnent une image de l’augmentation progressive du nombre de stations et de leurs localisations. (Les cases sont d’autant plus foncées que les stations y sont plus nombreuses.) On voit se dessiner peu à peu la forme des continents. Les carrés isolés dans les océans correspondent à de grandes îles.

Evolution du nombre de stations et de leurs localisations (à la maille de 10°x10° (1850-1900-1950-situation actuelle)

4/ Le découpage CRUTEM4v.

Pour pénétrer dans le détail des données, on peut se reporter à cette page, puis à celle-ci qui fait apparaître un globe terrestre avec son damier de quadrilatères sphériques. Les limites continentales sont figurées en jaune. On peut faire tourner le globe. L’image ci-dessous a été centrée sur la France.

En cliquant sur une case quelconque du damier, on obtient une fenêtre qui comporte :

  • les coordonnées géodésiques du centre de l’élément,
  • le graphique des anomalies de températures sous la forme déjà rencontrée, avec la moyenne mobile sur 20 ans,
  • diverses autres références.

Les éléments figurés en rose (déserts africains et arabiques), ne comportent aucune donnée.

5/ Exemple de la France.

On s’intéressera plus particulièrement au quadrilatère qui recouvre la partie centrale de la France :

Anomalies de températures du centre de la France (47.5N – 2.5E)

En cliquant sur « Stations », on obtient la carte des stations météo contenues dans l’élément en question, repérées par des punaises jaunes, avec leur dénomination et leur numéro de référence OMM (préfixe 07 pour la France). Dans le cas présent, on dénombre une cinquantaine de stations, dont 7 seulement [2] sont retenues, les autres ne présentant que des séries lacunaires et ne figurant que pour mémoire.

France : carte des stations météo

En cliquant sur une des stations, on obtient une fenêtre avec la série des températures, repérées cette fois par rapport au zéro Celsius.

Anomalies de températures à Lyon-Bron

Toutes les données sont disponibles (en format texte) en cliquant sur « Data ».

6/ Conclusions.

Ce bref aperçu permettra à chacun de se faire une idée de la robustesse des séries de températures continentales élaborées par le Hadley Center et la Climate Research Unit, qui sont très couramment utilisées. Elles sont relativement stables, les versions successives (marquées par un suffixe numérique) ne différant pas fondamentalement les unes des autres. Signalons qu’elles ont donné lieu à un certain nombre de critiques, notamment celles de John McLean (James Cook University). Il faut tout de même rendre justice aux initiateurs et aux mainteneurs de ces séries, car leurs méthodes et leurs données sont clairement expliquées et très accessibles.

Quelques observations pour conclure.

  • Les données des stations météorologiques sont fournies par les organismes ad hoc des pays concernés. On peut supposer que ces données sont honnêtement relevées et transmises, et que Hadley dispose de quelques tests de vraisemblance et de méthodes de contrôles aléatoires. Il n’en reste pas moins que les technologies de mesures ont considérablement évolué depuis un siècle et demi, sans parler des déplacements de stations et des changements dans leur environnement (par exemple, phénomène dit « ilot de chaleur urbain », ou cas assez courant des stations aéroportuaires).
  • Certains éléments, figurés sur le globe en rose (déserts) ou en vert (Amazonie) n’ont pu être renseignés, faute de données. Ces éléments sont certes peu nombreux (une trentaine), mais ils sont proches de l’équateur, donc avec un poids important.
  • Les éléments circumpolaires sont très lacunaires, mais il est vrai que leurs superficies sont a contrario réduites.
  • Il existe entre les éléments une grande disparité quant au nombres de stations, qui sont nombreuses dans les pays développés, mais rares voire uniques dans certaines zones peu peuplées. Ou encore quant à l’ancienneté des séries, notamment entre les deux hémisphères.

Ces remarques et quelques autres conduisent à relativiser la précision des données anciennes, comme le montre le graphique ci-dessous :

image012
Evolution des températures globales (terre et mer)

On voit notamment que les intervalles de confiance sont de l’ordre de 1°C pour la fameuse période dite « pré-industrielle ».

Or c’est sur ces bases incertaines que s’appuient les querelles actuelles portant sur des fractions de degrés Celsius, ainsi que les préconisations drastiques et les discours apocalyptiques que l’on sait.


[1] Bon an, mal an : 0,3 CRUTEM + 0,7 SST

[2] Bourges, Lyon-Bron, Limoges (2 stations), Paris-Le Bourget, Paris-Montsouris, Trappes.

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