Arctique, encore une mauvaise bonne nouvelle

Par Benoît Rittaud

C’est le fameux « canari dans la mine » qui démontre de façon incontestable que la crise climatique nous perdra si nous ne faisons pas pénitence : l’Arctique fond, au point qu’il sera très bientôt sans glace à cause de notre vie carboniquement inconsciente. Certes l’événement ne s’est pas encore produit, mais ne le dites pas à Al Gore, lui qui l’annonçait pour 2013 lors de sa réception du prix Nobel de la paix (en 2007).

Il est vrai que la tendance actuelle autorise à imaginer que, dans quelques années ou décennies, nous verrons un Arctique sans glace lors de son minimum annuel de septembre. Le pouvoir réfléchissant de l’eau liquide étant moindre que celui de la glace, cette fonte sera-t-elle le point de départ d’un emballement catastrophique, la banquise n’étant plus là pour renvoyer dans l’espace sa quote-part d’énergie reçue du Soleil ?

Pour commencer, il est bon de savoir que, quand il est question de « chute dramatique » de la banquise, on parle d’une baisse observée sur des données satellitaires qui n’existent que depuis les années 80. Sachant cela, les niveaux de fonte « jamais vus » qui font parfois les gros titres des médias sont tout de suite moins impressionnants. Pour aller plus loin, une équipe de scientifiques de l’université danoise d’Aarhus a récemment tenté de reconstituer le niveau de la banquise à des époques plus anciennes. Ses conclusions sont révélatrices pour deux raisons.

La première : à en croire les analyses menées dans la mer de Lincoln, il n’y avait probablement pas de glace du tout dans l’Arctique au début de l’Holocène, c’est-à-dire hier à l’échelle climatique (il y a dix mille ans). Et donc, même si la banquise venait à fondre complètement vers le milieu de notre siècle, l’événement n’aurait rien d’inédit. Hâtons-nous de disculper les hommes du Néolithique qui ont vécu sur cette Terre privée de banquise : leurs voitures étaient encore trop peu nombreuses pour émettre des quantités significatives de gaz à effet de serre. De plus, heureusement pour nos ancêtres, cette absence de glace au pôle nord n’a pas eu pour conséquence un quelconque emballement des températures. De leur côté, les ours polaires ont eux aussi fort bien survécu à l’épisode.

D’une manière générale, donc, cette découverte est nettement rassurante. C’est pourtant là qu’arrive le second point : prisonnière du narratif climatique, l’étude croit au contraire pouvoir conclure de ses propres résultats qu’il conviendrait absolument de « se conformer à l’accord de Paris » sur la limitation de la hausse des températures. Pourquoi donc ? Eh bien… parce qu’on ne sait jamais. Il pourrait se passer quelque chose d’« imprévu », allez savoir.

Voilà donc comment un résultat scientifique qui démontre une fois de plus la grande variabilité naturelle des phénomènes climatiques et le caractère non-figé du monde qui nous entoure parvient finalement à être retourné au profit de l’alarmisme à la mode. On ne peut s’empêcher de se demander si, par cette pirouette, les auteurs ne veulent pas tout simplement se protéger de l’accusation de dénialisme climatique qui vaut aujourd’hui excommunication dans les milieux universitaires. Si tel est le cas, on se gardera bien de leur jeter la pierre.

Référence
Detlef, H., O’Regan, M., Stranne, C. et al. Seasonal sea-ice in the Arctic’s last ice area during the Early Holocene. Commun Earth Environ 4, 86 (2023). (lien)

Partager

17 réflexions au sujet de « Arctique, encore une mauvaise bonne nouvelle »

    • Dans le lien que vous donnez, je lis ceci :

      “Le 21 septembre dernier, alors que l’hémisphère nord s’éloignait du soleil, les scientifiques ont rapporté avec une détresse sans précédent que la calotte glaciaire du pôle Nord « tombait d’une falaise ». Une étude a estimé qu’il pourrait disparaître complètement pendant l’été en moins de 22 ans. Une autre nouvelle étude, qui sera présentée par des chercheurs de l’US Navy plus tard cette semaine, prévient que cela pourrait se produire dans aussi peu que 7 ans.”

      Il me semble que cela a le même sens. Et les 7 ans sont passés depuis longtemps.

  1. Deux réflexions:
    Concernant l’Océan Arctique libre de glaces pour la navigation, plusieurs études ont indubitablement montré que cela s’est déjà produit au moins au début de l’Holocène sinon plus tardivement puisqu’on a retrouvé des squelettes de baleines datés de cette époque en des zones très septentrionales où elles ne peuvent plus accéder de nos jours à cause de la banquise permanente.
    En voici une: “A 10400-Year-Old Bowhead Whale (Balaena mysticetus) Skull from Ellef Ringnes Island, Nunavut: Implications for Sea-Ice Conditions in High Arctic Canada at the End of the Last Glaciation.”
    https://www.jstor.org/stable/40513263
    Pour ce qui est de la fonte du permafrost sous l’effet du réchauffement qui “pourrait” libérer des quantités phénoménales de méthane (provoquant un emballement définitivement inarrêtable de l’effet de serre) et, pire encore (horresco referens), des virus inconnus emprisonnés dans les glaces depuis le précédent interglaciaire et qui feraient peser une menace d’épidémies mortelles sur l’humanité, cela fait partie du pilonnage habituel de la politicogiécocarboécolomédiasphère auquel l’opinion occidentale est maintenant soumise nuit et jour.
    Ces prophètes d’apocalypse semblent ou font exprès d’ignorer pour alimenter leur propagande, que le permafrost s’étendait à la fin de la dernière glaciation jusque sous des latitudes tempérées.
    Je cite Wikipédia, pour une fois correct là dessus:
    “Le dernier maximum d’extension (du permafrost) date d’il y a 18 000-20 000 ans lors du Dernier maximum glaciaire (DMG), alors que par exemple, toute la moitié Nord de la France était gelée et le niveau de la mer plus bas d’environ 120 m. Le minimum d’extension date d’il y a 6 000 ans lors de la phase Atlantique dit « optimum climatique de l’Holocène ». Depuis, hormis un réchauffement de quelques siècles dans les années 800 lors de l’optimum climatique médiéval, avant le Petit âge glaciaire (PAG), les étés de l’hémisphère Nord se sont refroidis provoquant une tendance à l’extension territoriale du pergélisol.”
    Vous avez bien lu: …/…”les étés de l’hémisphère Nord se sont refroidis” (étonnant de lire ça sur Wikipédia !!!)
    La fonte du permafrost au cours de l’Holocène depuis disons depuis le 45e parallèle jusqu’au 60e parallèle Nord a frappé des surfaces infiniment plus considérables au cours de ces 10000 dernières années que celles qui fondent encore aujourd’hui et regèlent durant des périodes froides comme lors du P.A.G.
    Et AUCUN des scénarios catastrophes dont ils nous accablent ne s’est produit !

  2. Exacte ! Lors de son discours auprès de l’organisme de gestion des Nobel (il reçut celui de la Paix en 2007 avec l’IPCC), il a fait tout un blabla sur la fin du monde, et notamment a prédit la disparition des glaciers sous 10 ans en période estivale au pôle Nord. Nous étions alors en 2007… 🙂

    Al Gore est actuellement multimillionnaire, grâce à ses affaires dans la vente de titre carbone, dont il a participé à la mise ne œuvre et à l’envolée des prix… Très malin le gars… 🙂 Ah, et pour mémoire, à l’époque, au début des années 2000, quand il a lancé ce très juteux business il a fait appel à un cabinet d’avocat où se trouvait alors un certain Barack Hussein Obama, pas encore sénateur (2004) puis président, et qui sera en charge de ce dossier 😉 Le hasard est taquin… !

  3. Dans la même veine :
    un peu plus tôt, pendant l’interglaciaire précédent (-125.000 ans), le mammouth américain (Mastodon americanus) peuplait les forêts du grand nord canadien bien plus au nord qu’aujourd’hui ( ”aujourd’hui” = notre interglaciaire holocène – d’ailleurs en train de se refroidir avec des hauts et des bas). De nouvelles datations (Zazula et al. 2014) montrent que son extinction est liée à la glaciation du Winsconsin qui a suivi cet interglaciaire très chaud (où le niveaiu marin était d’ailleurs plus haut qu’aujourd’hui de qq mètres), et non à la prédation humaine.
    Si les journalistes, qui soit disant nous informent, voulaient se donner la peine de faire un peu de biblio scientifique, par exemple via google scholar (même en ne lisant que les résumés des articles), on lirait moins d’âneries dans la presse sur le climat et l’action forcément maléfique de l’homme avec son fichu CO2.
    Désolé, il a fait beaucoup plus chaud avant l’homme moderne et ses canicules insupportables, et pas très loin dans le passé.

  4. Le 18 mai 1987, trois sous marins émergeaient en même temps au pôle nord : un anglais le HMS Superb S 109, et deux américains le USS Billfish SSN 676 et le USS Sea Devil SSN 664.
    36 ans déjà.
    La banquise ne devait guère être épaisse.

  5. “à en croire les analyses menées dans la mer de Lincoln, il n’y avait probablement pas de glace du tout dans l’Arctique au début de l’Holocène, c’est-à-dire hier à l’échelle climatique (il y a dix mille ans). Et donc, même si la banquise venait à fondre complètement vers le milieu de notre siècle, l’événement n’aurait rien d’inédit”
    Donc pour réfuter toute crainte des Cassandres, l’auteur nous explique qu’il y a dix mille ans il n’y avait probablement pas de glace en Arctique. Ce qu’il oublie de dire c’est que l’Homme à cette époque comptait moins de 10 millions d’individus soit quasiment mille fois moins qu’actuellement. La population de la Suisse. Que ces individus étaient nomades donc échappaient bien plus facilement aux conséquence des intempéries (incendie, inondations, etc.) par les migrations.
    A ce titre notre civilisation est beaucoup plus fragile, car sédentaire, très nombreuse et interconnectée. Prenez un pays comme l’Égypte et voyez comment la guerre en Ukraine l’a mis sous pression car ils sont incapables désormais d’être auto suffisant d’un point de vue alimentaire. Et ce ne sont pas les seuls.
    Nous sommes la société du pétrole et tous les signaux montrent que la fin du pétrole abondant est proche. Une dizaine d’années tout au plus. Il suffit pour cela de voir la diversification des investissements de pays de Golfe et ce qu’en disent leurs potentats. Mohammed ben Zayed l’a dit très clairement mais ce n’est plus le seul.
    Encore une fois l’Homme ne va pas forcément disparaitre mais notre société sous sa forme, si. Et avant la fin du siècle.
    Mais bon si l’on suit monsieur Rittaud ce n’est pas un problème de vivre comme Cro Magnon…surtout quand on en a bien profité avant.

    • Cela fait 40 ans que l’on nous dit qu’il n’y a plus de pétrole que pour 10 ou 15 ans. Il faut arrêter avec cette bêtise. On nous a aussi expliqué que le peak oil aurait lieu au plus tard vers 2010 ou 2015, et pourtant la production continue d’augmenter : comment l’expliquez-vous ?
      Si l’on comprend ce que sont les données sur les réserves de pétrole, on sait que l’on n’a aucune idée de quand il n’y en aura plus.
      Cela ne veut pas dire qu’il faut le gaspiller, mais croire qu’il n’y en aura bientôt plus n’a aucun sens. Et la majorité des habitants de la planète va continuer d’en profiter. Ce ne sont pas les quelques millions d’Européens (qui se prennent pour le centre du monde) qui vont y changer grand chose.

      • @demokratia : MBS vient d’annoncer que l’Arabie saoudite atteindrait le pic de production en 2027. Dans moins de 4 ans. MBZ idem. Donc les pays du Moyen Orient qui représentent le tiers de la production savent que la manne est sur le point de se tarir dans les 10-20 prochaines années.
        Quand les pays producteurs eux-mêmes annoncent la fin de la “fête” il faudrait peut-être arrêter de se voiler la face.
        Quand on pense que le pétrole n’aura été qu’un feu de paille de 200ans, une broutille à l’échelle d’homo sapiens, ça donne à réfléchir.

        • Quand on voit comment l’homo sapiens a évolué sur ces 200 ans, entre autres grâce au pétrole, je pense qu’il ne doit pas se plaindre.

  6. Bonjour
    L’autre jour France 5 rediffusait un document très intéressant sur l’expédition Polar Stern.
    Le Polarstern, un brise-glace de recherche allemand, prend la direction du Pôle Nord dans le cadre d’une expédition scientifique internationale sans précédent. D’un budget de 140 millions d’euros, avec 20 pays engagés et 70 instituts de recherche, ce sont au total 300 personnes qui cherchent à comprendre l’impact de l’homme sur la planète. En effet, la banquise Arctique a perdu 30% de sa superficie depuis les années 80, c’est un indicateur évident du réchauffement climatique. Afin d’obtenir des mesures précises, l’équipe internationale de la mission MOSAIC va étudier in situ la structure de la banquise et son évolution sur une année, sa biodiversité et son rôle de climatiseur à l’échelle planétaire. Disponible jusqu’au 02/11/23
    https://www.france.tv/france-5/science-grand-format/2874157-expedition-arctique-au-coeur-du-rechauffement-climatique.html

    Dans ce document un élément interpelle :
    Avancez le curseur à 0.42.00
    La glaciologue Julienne Stroeve explique ;
    « Nous avons 40’années d’études sur la banquise, mais on ne connait pas son épaisseur ;…….
    Les satellites peuvent mesurer l’altitude du sol en arctique, mais n’ont jamais pu estimer quelle était la part relative de glace et de neige »
    Question ;
    Comment les experts Giec peuvent donc prédire et calculer depuis 30 ans l’élévation du niveau des océans a termes, s’ils ne connaissent pas le volume de glace qui fondrait avec le réchauffement ?
    Les données divulguées par les medias depuis des années sont-elles manipulées ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

captcha