Pollution aux particules fines « PM 2,5 » : 48 000 décès imaginaires

Par Christian Gerondeau

Toutes les dix minutes, un Français meurt prématurément du fait de la pollution de l’air, et notamment des particules qui proviennent de la combustion des énergies fossiles. Cette hécatombe, c’est 48 000 décès par an, c’est plus que tous les accidents de la route, tous les suicides, tous les meurtres, toutes les noyades, tous les accidents domestiques réunis .

Emmanuel Macron Président de la République Française (Discours du 27 Novembre 2018 en réponse aux « gilets jaunes »)

S’il est une « vérité » unanimement admise au point d’être répétée par les plus hautes autorités de l’État, c’est que la pollution de l’air, essentiellement due aux émanations des véhicules diesel, provoque 48 000 décès chaque année en France. Cette assertion découle d’une longue étude réalisée par l’organisme « Santé Publique France » (Établissement Public à caractère administratif placé sous la tutelle du Ministre chargé de la santé), et cosignée en 2016 par 17 personnes [1].

Cette étude mérite d’être analysée.

La méthodologie suivie repose sur les étapes suivantes :

1 – Les décès des années 2007 – 2008 sont recensés commune par commune

2 – Un modèle intitulé « Gazel-Air » évalue la concentration en microgrammes par mètre cube (µg/m3) des (particules fines « PM 2,5 » (moins de 2,5 microns de dimension) sur l’ensemble du territoire selon un découpage de 2 km par 2 km

3 – Le nombre de morts qui serait évité si la concentration en « PM 2,5 » était plus faible que ce qu’elle est, est évalué, commune par commune, selon la formule :

 

 

Avec ΔY = nombre de décès évités

Y0 = nombre de décès constaté

β = coefficient calculé en admettant un risque relatif de 1,15

Δx = Différence entre la concentration estimée selon le modèle,et la concentration « valeur cible » considérée comme souhaitable par différents organismes.

4 – Le calcul a été effectué avec 5 « valeurs cibles» différentes, le but étant de calculer le nombre de décès qui serait évité si chacune de ces valeurs cibles était respectée sur l’ensemble du territoire national.

5 – Les résultats sont les suivants :

particules fines

Seul le chiffre de 48 000 est abondamment repris par les médias et les responsables politiques nationaux et locaux.

La description rapide qui figure ci-dessus appelle plusieurs remarques.

I –Tout d’abord l’appellation « décès évités » largement reprise sans précaution par les responsables et les médias est fallacieuse car il s’agit tout au plus de décès prématurés.

II – Quant à lui, l’éventail des chiffres cités est très étonnant sinon stupéfiant, puisqu’il va de 11 (onze) à 74 426 ! Chacun peut donc retenir le chiffre qu’il veut en fonction de l’hypothèse qu’il retient…

III – La « valeur-cible » de l’Union Européenne de 25µg/m3 est quant à elle respectée. Le nombre de décès prématurés attribués à son dépassement, c’est-à-dire 11 (onze) est pratiquement nul. On peut d’ailleurs légitimement s’interroger sur le processus qui a permis d’obtenir ce chiffre, la probabilité d’aboutir aussi près de zéro au sein d’une population de 64 millions d’habitants étant infime.

IV -S’agissant de la valeur-cible de 4,9µg/m3, onne peut qu’être étonné par l’ampleur de l’incertitude affichée (de 17 527 à 74 426), sans parler du fait qu’avancer des chiffres à l’unité près confine au ridicule, alors que l’usage scientifique veut que dans de tels cas, on arrondisse au moins ceux-ci au millier le plus proche.

V – La « valeur-cible » de 4,9µg/m3 qui aboutit au chiffre de 48 000 décès évités et qui est cinq fois plus faible que la norme européenne n’est mise en avant que par Santé Publique France et par aucune autre instance nationale ou internationale (Hypothèse 1).

L’élaboration de cette hypothèse repose sur les étapes suivantes :

Les 36 219 communes françaises sont tout d’abord réparties en quatre catégories :

  • Communes rurales (29 008)
  • Communes de 2 000 à 20 000 habitants (3 847)
  • Communes de 20 000 à 100 000 habitants (1 597)
  • Communes appartenant à des zones urbaines de plus de 100 000 habitants (2026).

Au sein de chacune de ces quatre catégories, les communes sont classées en fonction de la concentration en particules « PM 2,5 » donnée par le modèle « Gazel Air ».

Le taux de 4,9µg/m3 retenu comme valeur cible dans l’hypothèse de base de Santé Publique France est celui des 5 % des communes rurales où la concentration est la plus faible.

Il s’agit évidemment d’un choix arbitraire, mais l’essentiel n’est pas là. Un coup d’œil sur une carte montre que toutes les communes concernées sont situées en montagne, à une altitude moyenne de 2 000 mètres (cf. carte jointe). On aurait pu s’attendre à ce que les communes les moins polluées soient situées en bordure de mer sur l’ouest du territoire national qui est balayé par les vents provenant de l’Atlantique, mais il faut se rendre à l’évidence : dans la situation actuelle de la France, les concentrations de particules sont avant tout liées à l’altitude.

communes de France les moins polluées

Fixer comme objectif à l’ensemble des communes françaises, dont l’altitude moyenne est inférieure à 300 mètres, de respecter la teneur en particules des communes situées à 2 000 mètres d’altitude est donc dépourvu de sens.

Si le sommet du Mont-Blanc avait été pris comme référence, peut-être le modèle aurait-il indiqué que la pollution était responsable de 100 000 décès et non 48 000.

II – Les dates de référence.

Les évaluations des nombres de décès résultant de l’étude Santé Publique France publiée en 2016 concernent les années 2007 et 2008. Mais la situation a changé du tout au tout depuis lors du fait notamment des progrès du parc automobile, les véhicules mis sur le marché depuis 10 ans n’émettant presque plus aucune particule fine.

Normes d’émission des particules (voitures Diesel)

Depuis 2009, les véhicules diesel mis sur le marché émettent donc, avec 0,5 gramme aux 100 kilomètres parcourus, 28 fois moins de particules que ceux de la norme Euro1, qui étaient déjà bien moins polluants que leurs prédécesseurs. En pratique, ils n’émettent presque plus rien. D’ailleurs, depuis 2009, les normes imposées sont les mêmes que pour les véhicules à essence, et il est donc possible de considérer que le problème est en pratique réglé.

Normes d’émission des particules (voitures à essence)normes Particules fines Essence

Du fait des normes en vigueur depuis 2009 tant pour les véhicules diesel qu’essence, le taux des particules « PM 2,5 »dans l’atmosphère est passé en Ile-de-France de 21 µg/m3 en 2007 à 12µg/m3 en 2017, soit une chute de 9µg/m3, c’est-à-dire de près de moitié !

Toutes les estimations de l’étude de Santé Publique France qui reposent sur les concentrations enregistrées en 2007 et 2008 n’ont donc plus la moindre valeur aujourd’hui.

La chute brutale des concentrations des particules fines dans l’air de nos grandes villes était parfaitement connue au moment de la parution de l’étude de Santé Publique France en 2016. On est conduit à se demander qui supervise ceux qui en sont les auteurs, et qui continue à cautionner près de trois ans plus tard des affirmations erronées dès l’origine, si la réponse n’était claire : sans doute personne.

Mais la chute brutale de concentrations atmosphériques enregistrée en Ile-de-France appelle un autre constat, fondamental quant à lui.

L’étude de Santé Publique France relève en effet qu’en 2007 – 2008, les concentrations moyennes en « PM 2,5 » étaient les suivantes :

  • Communes rurales : 9,9 µg/m3
  • 2000 – 20 000 habitants : 10 µg/m3
  • 20 000 – 100 000 habitants : 10,9 µg/m3
  • Zones urbaines > 100 000 habitants : 13,6 µg/m3

Cette énumération met tout d’abord en évidence qu’il n’y avait pratiquement pas de différence en 2007 entre les communes rurales et celles qui comptent jusqu’à 100 000 habitants : la taille de la commune n’intervient pratiquement pas et le taux moyen y est partout voisin de 10 microgrammes par mètre cube.

Seules faisaient exception il y a 12 ans,avec un taux moyen de 13,6 microgrammes par mètre cube, les communes des zones urbaines de plus de 100 000 habitants du fait du poids de l’Ile-de-France et de la concentration de 21 microgrammes qui y était alors constatée.

Mais la chute brutale des concentrations enregistrée depuis 2007 en Ile-de-France comme dans les autres zones urbaines de plus de 100 000 habitants a une autre conséquence : le taux moyen dans les zones urbaines a pratiquement désormais rejoint celui du reste du territoire. En 2019, il n’y a plus de différence notable entre la ville et la campagne quant à ce type de pollution : l’air est pratiquement aussi pur partout, à un niveau tel que les progrès ne peuvent plus être que marginaux sinon insignifiants les concentrations résiduelles étant désormais essentiellement d’origine naturelle.

Pour prendre conscience de la qualité de l’air ambiant actuel,quelques comparaisons ne sont pas inutiles, dans le temps comme dans l’espace.

Dans le temps

Sauf les plus anciens d’entre nous, nous avons oublié ce qu’était l’air de nos villes il y a quelques décennies seulement. Pour le savoir, il suffit de se référer à l’évolution des « fumées noires » dans le temps, telle qu’elle est retranscrite par les relevés effectués depuis plus d’un demi-siècle année après année à Paris, et que reproduit le diagramme ci-joint extrait du Bilan annuel publié par Airparif pour 2017. Comme le relève ce dernier: « Depuis la fin des années 1950, les niveaux moyens des fumées noires ont quasiment été divisés par 20 à Paris ; cette très forte amélioration est due à la baisse importante des suies issues de la combustion du charbon, puis à l’amélioration des procédés de combustion et de traitement des échappements automobiles. Les teneurs de 2009 à 2017 sont les plus faibles jamais enregistrées… ».

Il faut savoir que les « fumées noires » sont le constituant majeur des particules fines« PM 2,5 », et que la concentration dans l’air de ces dernières est donc toujours supérieure à celle des fumées noires.Le résultat laisse sans voix. A la fin des années 1950, le taux des « PM 2,5 » dans l’air que respiraient les Parisiens avoisinait au moins 200, contre 12 aujourd’hui [2] !

 Dans l’espace

La comparaison des concentrations de « PM 2,5 » sur les différentes parties de la planète, telles qu’elles sont relevées par l’OMS, est tout aussi stupéfiante.

Ce n’est pas dans les pays développés qu’elle est aujourd’hui la plus importante. Bien au contraire ceux-ci les ont maîtrisées, ailleurs comme en France. C’est dans les zones désertiques où n’existent pas d’activités humaines qu’elles sont extrêmement élevées. En l’absence de végétation, rien ne s’y oppose à leur dispersion dans l’atmosphère sous l’influence du vent et ceci d’abord pour les particules les plus fines, et notamment les « PM 2,5 » (cf. carte-jointe).

C’est donc au milieu du Sahara et des autres zones désertiques du monde que leur concentration est aujourd’hui la plus élevée, ainsi par conséquence que dans les villes qui les voisinent, telles que Le Caire ou Riyad où la concentration moyenne annuelle des « PM 2,5 » atteint 108 microgrammes par mètre cube contre 12 à Paris sans que le diesel y soit évidemment pour quelque chose ! C’est le fameux « Adjadj », brouillard de sable et de pollution qui assombrit le ciel et plombe si souvent l’air du Sahel.

Et il ne faudrait pas croire que les particules du désert aient une influence potentielle différente des nôtres. Selon le Centre International du Cancer (CIRC), émanation compétente de l’OMS : « Les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et des réglementations nationales considèrent que les particules fines ont toutes la même toxicité, malgré le grand nombre de sources et de compositions chimiques » (Communiqué du 25 juin 2018).

 Qu’il s’agisse des comparaisons dans le temps ou dans l’espace, une conclusion s’impose : les concentrations de particules fines enregistrées dans l’air des villes des pays développés, y compris la France et sa capitale, sont désormais extrêmement faibles et guère différentes de celles qui règnent dans les campagnes qui les entourent. Elles sont dix à vingt fois plus faibles que ce qu’elles étaient autrefois et ce qu’elles sont encore ailleurs sur la planète, et une conclusion s’impose : la crainte qu’elles suscitent n’a plus de raison d’être et l’estimation de 48 000 décès par an n’a pas de crédibilité.

D’autres interrogations pourraient être soulevées au sujet de l’étude de « Santé Publique France ».

Que valent des modèles qui, à partir de quelques dizaines d’appareils enregistreurs tout au plus pour toute la France, affirment pouvoir évaluer avec une précision de 2 kilomètres sur 2 kilomètres les concentrations des « PM 2,5 » sur la totalité du territoire national ?

Quelle fiabilité accorder à la formule mathématique déjà citéequi relierait la mortalité au taux de « PM 2,5 », formule dont la validité est contestée par de nombreux scientifiques qui aboutissent à la conclusion qu’il n’y a pas de relation prouvée entre la concentration de ces particules dans l’air de nos villes et le nombre de décès ?

D’ailleurs, en adoptant cette formule, tous les Parisiens n’auraient-ils pas dû mourir autrefois quand il y avait 20 fois plus de particules fines qu’aujourd’hui ?

 Il ne sera pas tenté de répondre ici à ces questions car c’est inutile. Il suffit de constater tout d’abord que la référence prise en compte dans l’étude de Santé Publique France, c’est-à-dire la concentration des « PM 2,5 » à 2 000 mètres d’altitude est dépourvue de sens et constitue un biais majeur. Il suffit surtout de constater que, grâce aux progrès techniques, les concentrations aujourd’hui enregistrées dans nos villes sont marginales en regard de ce qu’elles étaient et de ce qu’elles sont encore dans beaucoup d’autres lieux sur la planète, et qu’en conséquence affirmer qu’elles sont une cause majeure de mortalité dans notre pays ne peut être qu’une contrevérité. Est-il alors justifié de mettre en péril des pans entiers de l’industrie européenne sur la base de fausses informations ?

S’il fallait une confirmation de l’inanité du chiffrage de 48 000 décès partout répété, il suffirait de noter que l’OMS, par le canal de son émanation le CIRC, évalue à 0,4 % la proportion des cancers survenant en France qui sont imputables à la pollution de l’air extérieur, soit 1 400 cas par an dont tous ne sont pas mortels, et dont rien ne prouve qu’ils soient liés aux activités humaines (Communiqué du CIRC du 25 juillet 2018).

Comme le montre l’exemple de la fumée du tabac, il faut enfin ajouter que les particules fines ne déclenchent éventuellement un cancer que 20 à 30 ans après leur inhalation, si ce n’est plus.

Les chiffres de l’OMS (CIRC) concernent donc des cancers qui résultent des niveaux de pollution qui existaient il y a un quart de siècle au moins. Or le niveau actuel est incomparablement plus faible, de telle sorte que le nombre de cancers qui lui seront éventuellement imputables dans plusieurs dizaines d’années sera nécessairement marginal.

Il faut dire que Santé Publique France ne fait en l’occurrence que s’inscrire dans la ligne des pouvoirs publics français, puisque ceux-ci ont recours à la forfaiture qui consiste à faire croire que la pollution aux particules fines présente un danger immédiat pour la santé. Seuls au monde, et contre l’avis formel de l’OMS, ceux-ci déclenchent en effet des alertes lorsque les concentrations de particules approchent de seuils au demeurant dérisoires, en instaurant des restrictions à la circulation dépourvues de sens pour une pollution à effet différé de plusieurs décennies, et qui n’ont d’autre but que d’entretenir une psychose aujourd’hui infondée.

CONCLUSION

Que penser de cet ultime constat qui s’ajoute à une liste d’erreurs déjà si longue, si ce n’est que cette étude est nulle et non avenue, et que les 48 000 décès annuels qui feraient d’une pollution de l’air qui a pratiquement disparu la seconde cause de mortalité en France, à égalité avec l’alcool, sont purement imaginaires ?

Le bon sens aurait-il disparu de notre pays ?Le ou les auteurs de cette invraisemblance étaient-ils mus par l’idéologie ambiante ou victimes de leur incompétence, à moins que ces deux causes ne se soient cumulées pour produire un tel document ? Peu importe, ce qui est certain, c’est que le fruit de leurs travaux n’aurait jamais dû franchir les limites de leurs bureaux, et être immédiatement mis au rebut par leur hiérarchie au lieu d’être cosigné par 17 personnes qui l’ont ainsi validé. Normalement, une étude de telle nature aurait dû être auditée et contrôlée par des personnalités indépendantes et compétentes, mais ce ne fut clairement pas le cas. Jamais un document à la méthodologie si critiquable et comportant autant d’erreurs et de contrevérités n’aurait été avalisé par le comité de lecture d’une revue scientifique digne de ce nom. Mais il n’y eu aucun, alors qu’il s’agit pourtant d’un sujet d’une exceptionnelle importance puisqu’il traite de la vie et de la mort de nos concitoyens et qu’il entraîne des conséquences très lourdes pour notre économie.

Au-delà de la hiérarchie de « Santé Publique France », il se trouve en outre de multiples responsables administratifs et politiques plus haut placés qui ne se sont pas interrogés un instant sur la plausibilité du rapport et lui ont au contraire donné la plus large publicité, contribuant ainsi à convaincre nos concitoyens de la nocivité d’un air pourtant devenu pur ou presque, et au-delà, du caractère néfaste du monde dans lequel ils vivent.

Ce sont pourtant des milliers de personnes qui œuvrent au sein des organismes publics consacrés à l’environnement et que paye le contribuable, car « Santé Publique France » n’est pas seul en cause. L’Ademe, Airparif, les multiples services et départements du Ministère en charge de l’environnement, tous désinforment à grande échelle sans jamais être contredits par les responsables administratifs et politiques dont ils dépendent,trop heureux qu’ils sont de trouver des confirmations à leur vision négative du monde.


[1] Impact de l’exposition chronique aux particules fines sur la mortalité en France continentale et analyse des gains en santé de plusieurs scénarios de réduction de la pollution atmosphérique.

[2] Une autre preuve de la quasi-disparition des particules de l’air de nos villes est apportée par la blancheur retrouvée de leurs façades. Celles-ci restent intactes pendant des décennies, comme en témoigne par exemple Notre Dame de Paris, encore immaculée vingt-cinq ans après avoir été ravalée. Nos contemporains ne mesurent pas la chance qu’ils ont de pouvoir contempler les beautés de leurs villes comme jamais leurs prédécesseurs n’ont pu le faire, car elles étaient noires des suies que sont les particules fines

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