UAH, RSS, NOAA, UW : quel jeu de données satellitaires devrions-nous croire?

Par Roy Spencer

Traduction d’un article publié le 23 avril 2019 sous le titre : UAH, RSS, NOAA, UW: Which Satellite Dataset Should We Believe?

Cet article comprend deux parties : la première concerne une étude récemment publiée sur les tendances de la température de la surface du sol mesurée par les satellites AIRS ; la seconde est une réponse à un commentaire Twitter dénigrant méchamment notre ensemble de données de température globale UAH qui était justement une réponse à cette étude.

L’étude AIRS

Le sondeur infrarouge atmosphérique par infrarouge AIRS (Atmospheric Infra-Red Sounder) de la NASA dispose de milliers de canaux infrarouges qui ont permis de fournir une grande quantité de nouvelles informations de télédétection depuis le lancement du satellite Aqua au début de 2002. AIRS a même démontré comment l’augmentation du CO2 au cours des 15 dernières années a réduit le refroidissement par infrarouge dans l’espace aux longueurs d’onde influencées par l’émission et l’absorption de CO2, ce qui constitue à ma connaissance la première preuve par l’observation que l’augmentation du CO2 peut modifier, même de façon minime, le budget énergétique global.

Le défi pour AIRS en tant qu’instrument de surveillance du réchauffement de la planète est qu’il est contraint par la nébulosité, problème qui s’aggrave à mesure que l’on se rapproche de la surface de la Terre. Il ne peut mesurer la température de la surface du sol que lorsqu’il n’y a pratiquement pas de nuages. La température de la surface du sol par temps nuageux est encore « restituée » par d’autres canaux plus haut dans l’atmosphère, et par des algorithmes de «compensation du nuage». Mais ces exercices numériques exotiques ne pourront jamais contourner le fait que la température de la surface du sol ne peut être observée avec les mesures infrarouges par satellite qu’en l’absence de nuages .

Ensuite, il y a un problème supplémentaire, c’est qu’il faut comparer les températures de la surface du sol aux températures de l’air à 2 mètres, en particulier au dessus de la terre. Il y a de gros biais aux heure d’observation d’AIRS  à 1h30 AM et PM. Mais j’ai tendance à penser que les tendances climatiques de la température de la surface du sol devraient être raisonnablement proches des tendances de la température de l’air, ce n’est donc pas un grave problème pour moi (bien que Roger Pielke, Sr. ne soit pas du même avis).

Le nouvel article de Susskind et al. décrit sur une période de 15 années un ensemble de données des températures de la surface du sol de la planète provenant de l’instrumentation AIRS embarquée sur le satellite Aqua de la NASA. La revue  ScienceDaily s’est empressé d’affirmer que l’étude « vérifiait les tendances du réchauffement de la planète », même si la période considérée (15 ans) est trop courte pour être significative des tendances du réchauffement de la planète, d’autant plus qu’un El Niño record a été enregistré à la fin de cette période.

En outre, même nos données de température troposphérique (LT) UAH montrent pour cette période (janvier 2003 à décembre 2017) un réchauffement significatif, avec une tendance qui est de 0,01 °C supérieure aux données de température de surface HadCRUT4 considérées comme « le standard absolu »  :

Réchauffement par décennie en degré Celsius :

AIRS: +0.24
GISTEMP: +0.22
ECMWF: +0.20
Cowtan & Way: +0.19
UAH LT: +0.18
HadCRUT4: +0.17

Je suis à peu près sûr que le papier de Susskind et al.  était censé conforter le jeu de données GISTEMP de Gavin Schmidt, qui montre généralement un réchauffement plus important que le jeu de données HadCRUT4 que le GIEC a tendance à privilégier. Il reste à voir si le jeu de données de température de surface de la terre AIRS, avec son «biais du ciel clair », sera accepté comme le moyen de surveiller les tendances de la température mondiale à l’avenir.

Quel jeu de données satellitaires devons-nous croire?

A l’évidence, la période d’enregistrement de la base de données AIRS est trop courte pour avoir pu prendre en compte les ajustements apportés aux différentes bases de données de la température mondiale avant 2003 qui ont eu un impact significatif sur les tendances de la température calculées sur plus de 40 années de données.

Ce que je veux spécifiquement aborder ici est un commentaire publié par le Dr Scott Denning sur Twitter, diabolisant notre ensemble de données satellitaires (UAH). Il répondait à quelqu’un qui s’opposait à la nouvelle étude, affirmant que nos données satellitaires UAH indiquaient un réchauffement minime. Alors que la personne qui a posté cette objection n’avait pas les bonnes données ( comme on l’a vu ci-dessus, la tendance de nos données s’accorde même avec celle de HadCRUT4 pour la période 2003-2017), Denning a pris sur lui de balayer nos données avec le Tweet ci-dessous :

Scott Denning

Tout d’abord, je ne sais pas du tout de quoi Scott parle quand il cite les tours d’observation et les aéronefs… il n’ya pas eu de comparaison complète de ces sources de données avec les données satellitaires mondiales, principalement parce la couverture géographique des tours et des avions est insuffisante.

Deuxièmement, depuis plus de 25 ans et plus que John Christy et moi-même avons mis au point les méthodes que d’autres utilisent maintenant, nous n’avons commis qu’une «erreur» (constatée par RSS ) qui avait trait à un ajustement précoce de la dérive diurne que nous avons rapidement corrigée. La mise en évidence par RSS de l’effet de décroissance de l’orbite n’était pas plus une «erreur» de notre part, que ne l’était de leur part notre découverte d’un effet « température  propre aux instruments ». Tous les jeux de données satellitaires incluent désormais des ajustements pour ces deux effets.

Néanmoins, comme beaucoup d’entre vous le savent, notre ensemble de données UAH est maintenant considéré comme « aberrant » par rapport aux autres données satellitaires (qui incluent également les flux RSS, NOAA et U. of Washington), avec un moindre réchauffement moyen depuis 1979 (bien que nos données s’accordent mieux sous les tropiques, où le réchauffement a été faible). Parlons donc de la dernière affirmation de Scott Denning selon laquelle nos données ne s’accordent pas avec les données indépendantes.

Les seules comparaisons directes avec les températures satellitaire de couche profonde proviennent de radiosondes et de données issues de ré analyses globales (qui incluent de façon cohérente toutes les observations météorologiques). Nous verrons que RSS, la NOAA et UW ont des erreurs résiduelles dans leurs jeux de données pour lesquelles ils refusent de faire des ajustements.

De fin 1998 jusqu’en 2004, deux satellites étaient en service : NOAA-14 avec la dernière série d’instruments MSU, et NOAA-15 avec la nouvelle génération d’instruments AMSU. Au cours de la seconde moitié de cette période de chevauchement, un désaccord considérable s’est développé entre les deux satellites. Puisque l’ancienne instrumentation MSU était connue pour dépendre de la température propre de l’instrument ( biais résolu par l’AMSU), et que le satellite NOAA-14 sur lequel était embarqué l’instrumentation MSU avait dérivé beaucoup plus longtemps qu’aucun autre satellite précédemment, nous avons choisi d’interrompre le traitement des données NOAA-14 lorsque celle-ci on commencé  à diverger substantiellement  des données AMSU (l’ingénieur James Shiue de la NASA/Goddard a un jour qualifié la nouvelle AMSU comme la « Rolls » des sondes de température à micro longueur d’ondes ondes bien calibrées).

Malgré des preuves de plus en plus évidentes selon lesquelles les données NOAA-14- MSU n’étaient plus utilisables, RSS, NOAA et UW ont continué à utiliser toutes les données du NOAA-14 pendant toute leur durée de vie et à les traiter de la même façon que si elles avaient été aussi précises que les données NOAA-15 AMSU. Étant donné que la NOAA-14 réchauffait plus que NOAA-15 de façon significative, il en est résulté une tendance au réchauffement plus marquée dans leurs jeux de données satellitaires, augmentant la température de toutes les mesures des satellites postérieures à l’an 2000.

Mais plutôt que de simplement affirmer que la nouvelle AMSU est plus crédible que l’ancienne MSU, examinons quelques données. Puisque Scott Denning mentionne des données des ballons météo (radiosondes), examinons le comparatif que nous avons publié des 4 jeux de données satellitaires avec les données provenant des radiosondes et celles issues des ré analyses globales et voyons quel est celui qui s’accorde le mieux avec les données indépendantes :

données satellitaires

Comparaison des tendance entre 4 jeux de données satellitaires , les radiosondes (bleu) et les ré analyses (rouge) pour le canal troposphérique MSU2 / AMSU5 sous les tropiques pour la période 1979-2005 ( les tendances des ballons sont calculées à partir du sous-ensemble des points de contact où se trouvent les stations de radiosondage, tandis que les ré analyses donnent une couverture complète des tropiques. Pour des comparaisons directes voir ce document).

Il est clair que ce sont les jeux de données satellitaires RSS, NOAA et UW qui paraissent aberrantes lorsqu’on les compare avec les radiosondes et les ré analyses ; elles montrent en effet un réchauffement excessif par rapport aux données indépendantes.

Vous vous demandez peut-être pourquoi ces trois jeux de données satellitaires sont si bien accordés ? Principalement parce que UW et la NOAA ont largement suivi l’exemple de RSS… en utilisant les données de la NOAA-14 même lorsque leur étalonnage dérivait, et en ayant recours à des stratégies similaires pour les ajustements de la dérive diurne. Ainsi, NOAA et UW sont, en première approximation, des versions légèrement modifiées du jeu de données RSS.

Peut-être Scott Denning était-il juste de mauvaise humeur ce jour là. Dans le passé, il avait su se montrer raisonnable, étant le seul scientifique du climat « alarmiste » ayant accepté de prendre la parole lors d’une conférence sur le climat organisée par Heartland. Peut-être a-t-il été contraint depuis à suivre la ligne alarmiste et n’a pas été autorisé à se départir de son obligation de réserve.

En tout état de cause, je me suis senti obligé de défendre notre travail en réponse à ce que je considère (et j’en ai fourni des preuves ) comme une attaque injuste et inexacte dans les réseaux sociaux dirigée contre notre ensemble de données UAH.

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