L’éruption du volcan Tonga-Hunga a provoqué une injection sans précédent de vapeur d’eau dans la stratosphère

Nous avons le 8 mai 2023 traduit de l’anglais un article du CNRS intitulé Tirer les leçons de l’éruption du Hunga Tonga. L’éruption de ce volcan sous-marin en janvier 2022 (resté ignorée des médias parce qu’il s’est déroulé à 150 mètres sous l’eau dans le Pacifique Sud) y est décrite comme l’événement climatique le plus remarquable des trois dernières décennies. « C’est aussi la première fois qu’une éruption réchauffe le climat mondial» avait commenté Pasquale Sellitto, maître de conférences à l’université Paris-Est Créteil et membre du LISA (Laboratoire Interuniversitaire des Systèmes Atmosphériques). Dans un article du 13 octobre 2022, nous avions traduit un article du Volcanoes Study Group, Hong Kong qui indiquait que cette éruption pourrait expliquer les précipitations record dans l’est de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Enfin, un article du 2 juillet de Jim Johnstone et Judith Curry suggérait que cette éruption était une des causes possibles des températures extrêmement chaudes dans l’Atlantique Nord.  

Le texte ci-dessous, qui s’appuie sur diverses publications (la NASA, l’Agence spatiale européenne, les revues Nature et Geophysical Research Letters, insiste sur l’injection sans précédent de vapeur d’eau dans la stratosphère qui pourrait être suffisante pour provoquer temporairement l’élévation de la température moyenne mondiale de la Terre. 


Le niveau de vapeur d’eau dans l’atmosphère a considérablement augmenté au cours des 18 derniers mois. Or la vapeur d’eau est un puissant gaz à effet de serre, et sa concentration accrue dans l’atmosphère conduit à son réchauffement, un mécanisme qui prend le pas sur l’effet du CO2.

La cause de l’augmentation de la concentration spectaculaire de la vapeur d’eau atmosphérique est une éruption volcanique gigantesque qui a eu lieu en janvier 2022, à 150 mètres sous l’eau dans le Pacifique Sud. Le site de la NASA montre en accéléré les images satellites de l’éruption sous-marine et du panache de gaz et d’eau injecté dans l’atmosphère :

Crédits : Image animée l’éruption par l’Observatoire de la Terre de la NASA par Jesse Allen, utilisant les données Landsat de l’US Geological Survey

Lorsque le volcan Hunga Tonga-Hunga Ha’apai est entré en éruption le 15 janvier, il a envoyé un tsunami dans le monde entier et déclenché un bang sonique qui a fait deux fois le tour du globe. L’éruption sous-marine dans l’océan Pacifique Sud a également projeté un énorme panache de vapeur d’eau dans la stratosphère terrestre, suffisante pour remplir plus de 58 000 piscines olympiques. La quantité de vapeur d’eau pourrait être suffisante pour affecter temporairement la température moyenne mondiale de la Terre. “Nous n’avons jamais rien vu de tel”, a déclaré Luis Millán, spécialiste de l’atmosphère au Jet Propulsion Laboratory de la NASA en Californie du Sud. Il a mené une nouvelle étude examinant la quantité de vapeur d’eau que le volcan Tonga a injectée dans la stratosphère, la couche de l’atmosphère située entre 12 et 53 kilomètres au-dessus de la surface de la Terre.

Nasa (Tonga Eruption Blasted Unprecedented Amount of Water Into Stratosphere)

La nouvelle étude de Luis Millán a été publiée en juillet 2022 dans la revue Geophysical Research Letters. Dans cette étude, Millán et ses collègues estiment que l’éruption des Tonga a envoyé environ 146 téragrammes (1 téragramme équivaut à mille milliards de grammes) de vapeur d’eau dans la stratosphère terrestre, soit 10 % de l’eau déjà présente dans cette couche de l’atmosphère. C’est près de quatre fois la quantité de vapeur d’eau qui a été projetée dans la stratosphère lors de l‘éruption du mont Pinatubo aux Philippines en 1991.

Dans une étude publiée le 14 décembre 2022 par la revue Nature, une équipe de scientifiques a calculé une augmentation sans précédent de 13 % de la masse d’eau stratosphérique mondiale (par rapport aux niveaux climatologiques) et une multiplication par cinq de la charge d’aérosols stratosphériques, la plus élevée des trois dernières décennies.
En utilisant une combinaison de données satellitaires, y compris des données du satellite Aeolus de l’ESA, et des observations au sol, l’équipe a découvert qu’en raison de l’altitude extrême, le panache volcanique a fait le tour de la Terre en seulement une semaine puis s’est dispersé presque d’un pôle à l’autre en trois mois.
Le Jet Propulsion Laboratory de la NASA fournit les explications détaillées suivantes :


Les éruptions volcaniques injectent rarement beaucoup d’eau dans la stratosphère. Au cours des 18 années où la NASA a effectué des mesures, seules deux autres éruptions (l’événement de Kasatochi en Alaska en 2008 et l’éruption de Calbuco en 2015 au Chili) ont envoyé des quantités appréciables de vapeur d’eau à des altitudes aussi élevées. Mais ce n’étaient que des soubresauts par rapport à l’événement du Tonga, et la vapeur d’eau des deux éruptions précédentes s’est rapidement dissipée. L’excès de vapeur d’eau injectée par le volcan Tonga, en revanche, pourrait rester dans la stratosphère pendant plusieurs années. Cette vapeur d’eau supplémentaire pourrait influencer la chimie de l’atmosphère, favorisant certaines réactions chimiques qui pourraient temporairement aggraver l’appauvrissement de la couche d’ozone. Cela pourrait également influencer les températures de surface. Les éruptions volcaniques massives comme le Krakatoa et le mont Pinatubo refroidissent généralement la surface de la Terre en éjectant des gaz, de la poussière et des cendres qui réfléchissent la lumière du soleil dans l’espace. En revanche, le volcan Tonga n’a pas injecté de grandes quantités d’aérosols dans la stratosphère, et les énormes quantités de vapeur d’eau provenant de l’éruption peuvent avoir un effet de réchauffement temporaire, car la vapeur d’eau retient la chaleur. L’effet se dissipera lorsque la vapeur d’eau supplémentaire sortira de la stratosphère.

Source : Jet Propulsion Laboratory de la NASA

Nous aurons ainsi une source de chaleur atmosphérique supplémentaire « pendant plusieurs années » jusqu’à ce que la vapeur d’eau supplémentaire injectée par la plus grande éruption volcanique sous-marine jamais enregistrée se dissipe.

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17 réflexions au sujet de « L’éruption du volcan Tonga-Hunga a provoqué une injection sans précédent de vapeur d’eau dans la stratosphère »

  1. message laissé sur
    https://www.skyfall.fr/2022/01/01/fil-info-de-sceptiques-2022/#comment-458476
    “”””””””L’air chaud peut contenir plus de vapeur d’eau que l’air froid ; donc le cercle vicieux est entamé ; c’est juste pour empêcher la montée du niveau de la mer suite à la fonte des glaciers laugh rofl wacko”””””””
    Et c’est ainsi que nous sommes entrés dans une nouvelle ère. « L’ère du réchauffement climatique est terminée, l’ère de l’ébullition mondiale est arrivée », a déclaré António Guterres, le chef de l’ONU, la semaine dernière.

    • Oui cela explique que, au contact de masses d’air plus froid nous ayons aujourd’hui des condensas donc des précipitations jamais enregistrées auparavant notamment en Grèce 800 mm soit 800 litres soit 800 kgs au mètre carré !

  2. Étant donné la température de la stratosphère et de l’altitude, la vapeur d’eau devrait geler instantanément et la chaleur produite par la solidification de la vapeur d’eau, filer directement vers l’espace sous forme d’infrarouge.
    Par contre l’augmentation de l’humidité de la troposphère de cette région n’est pas sans conséquence locale.

    • “Sans conséquences locales”
      Le monstrueux nuage de vapeur d’eau a fait plusieurs fois le tour le la Terre. Les conséquence sont mondiales. Il est probable que le réchauffement anormal de l’Atlantique Nord en soit une.
      Pour une fois que l’effet de serre d’un gaz, en l’occurence 140 millions de tonnes de vapeur d’eau, se manifeste, le GIEC devrait exulter !

      • Je suis d’accord que la température des eaux de surface océaniques peuvent augmenter mais cependant localement (quelques plusieurs milliers de km autour du volcan).
        On parle d’un équilibre gaz liquide qui est un équilibre qui s’atteint très rapidement. La constante d’équilibre ne dépend que de la température.
        L’eau condensée est plus chaude que l’eau de surface océanique toujours à proximité du volcan et l’humidité relative reste élevée et persistante dans ces régions jusqu’à ce que la température et l’humidité s’équilibrent.
        C’est, à mon avis d’abord localement que l’impact est important.

  3. S’il y a plus d’eau, il y aura plus de nuages, plus de pluies, un albedo plus élevé, moins d’ensoleillement et finalement un refroidissement suivant le réchauffement temporaire. Bref, ces variations climatiques sont parfaitement naturelles, comme d’habitude devrait-on ajouter. CQFD.

  4. Au fond la Nature n’est pas si mal faite !
    Votre commentaire est fort heureusement bien plus logique, pertinent et optimiste que le “point de bascule irréversible” et définitivement apocalyptique des prophètes de malheur catastrophîles de l’ONU.

  5. Une éruption volcanique faisant bien l’affaire des réchauffistes… Au moment ou leur thèse commence à être sérieusement interrogée!
    Je rappellerai simplement que l’utilisation de la bombe atomique afin de provoquer des séismes a été envisagée dès la fin de la seconde guerre mondiale (il y a même eu des essais, me semble-t-il)…
    Je me méfie toujours des coïncidences qui tombent bien (pour ceux qui tiennent le manche)!

  6. @Rgoer et Jack
    Plus l’air est chaud , plus l’ eau qu’il contient est sous forme vapeur , ce qui n’augmente pas son albédo mais augmente son effet de serre

    • OK, mais si la teneur en vapeur d’eau augmente, la nébulosité aussi, ce qui renvoie une partie du rayonnement solaire dans l’espace et refroidit la Terre.
      La nébulosité c’est la clé du climat, pas le CO2.

      • Oups pas d’accord ! L humidité est LE gaz à effet de serre le plus puissant donc les infrarouges courts passent même s’il y en a moins très probablement mais les infrarouges longs sont davantage retenus donc réchauffement

    • La vapeur d’eau (gaz H²O) à la température ambiante de 273 K (0°C) a une pression partielle, à saturation, de 5.33 hPa dans l’atmosphère. Plus la température augmente plus on peut faire “entrer” de vapeur d’eau dans l’atmosphère. A 373 K (100 °C) ce gaz H²O pourra occuper tout le mélange gazeux à lui tout seul et sa pression sera alors de 1013 hPa. Rappel : dès que des nébulosités (nuages, brume) deviennent visibles il ne s’agit plus de vapeur mais bien d’eau (condensée). La nébulosité qui augmente va augmenter l’albédo de la planète et ainsi favoriser la réflexion de l’énergie que nous envoie le soleil et participer dans une certaine mesure à une régulation de la température globale.

  7. C’est juste pour lancer des discussions pendant ces temps de vacances où on s’ennuie
    La planète Vénus est couverte de nuages de SO2 qui empêchent de voir sa surface et doivent renvoyer une bonne partie de la lumière solaire
    Son atmosphère c’est 95 % de CO2 et sa température au sol de 450 degrés C

  8. Le site WUWT (https://wattsupwiththat.com/2023/08/05/record-global-temperatures-driven-by-hunga-tonga-volcanic-water-vapor-visualized/ ) parle également de cet événement Hunga-Tonga de janvier 2022. Il fournit un lien vers des cartes satellitaires NASA (MODIS) de la teneur en eau de l’atmosphère et des températures de surface de l’océan de juillet 2002 à juin 2023 :
    https://earthobservatory.nasa.gov/global-maps/MYDAL2_M_SKY_WV

    Le moins qu’on puisse dire c’est que l’événement n’a pas radicalement changé les patrons d’évolution des années précédentes. Les études consacrées à cet événement et ses conséquences sont surtout basées sur des calculs. Les conséquences prévisibles sont truffées de conditionnels. On en pensera ce qu’on voudra. Voir à ce sujet les intéressants commentaires des lecteurs sur le site…
    Je retiens surtout que les températures de l’été sur l’Europe occidentale sont basses. On cherche le réchauffement. L’été est assez froid (et pluvieux), mis à part les deux pics de température enregistrés en France correspondant à deux gonflements vers le nord de l’énome anticyclone statique centré sur la Méditerranée. On a surtout l’impression que le gradient de températures a brusquement monté entre la zone tempérée et la zone tropicale.
    Alors, les calculs et les conditionnels… Je deviens méfiant envers la science actuelle, de plus en plus basée sur des calculs et des modèles bourrés d’à priori, et faisant fi des observations.

  9. Les éruptions volcaniques peuvent être catastrophiques comme ce Laki qui désorganisa l’agriculture a un moment ou la guerre de libération des Amériques demandait toujours plus d’argent et d’impôts en particulier pour la marine. Si cette conjonction des deux phénomènes servi d’initiateur l’histoire ensuite fut plus complexe mais nous connaissons à peu près la suite alors que l’éruption de ce volcan est-il enseigné..
    https://www.lepoint.fr/culture/les-mysteres-de-l-histoire-le-volcan-de-la-revolution-09-07-2013-1702139_3.php#11

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