Vous avez dit urgence climatique ?

Par François Gervais

Mis à jour le 17 janvier 2022

On trouve dans le Résumé à l’attention des décideurs (SPM) du dernier rapport AR6 du GIEC les deux assertions suivantes :

On estime que chaque 1000 GtCO2 d’émissions cumulées de CO2 causera probablement une augmentation de 0,27°C à 0,63°C de la température de surface mondiale avec une meilleure estimation de 0,45°C.

Summary for Policymakers (paragraphe D.1.1)

La terre et l’océan ont absorbé une proportion quasi constante (globalement environ 56 % par an) des émissions de CO2 (A.1.1)

Summary for Policymakers (paragraphe A.1.1)

La deuxième assertion confirme que le pourcentage d’émissions qui reste dans l’atmosphère (airborne fraction) est de 44 %. Parmi les 36 GtCO2 émis en 2019 avant les confinements dus à la pandémie, 16 GtCO2 sont donc restés dans l’atmosphère, au moins temporairement.

On peut déduire de la première que les émissions de 2019 auraient ainsi réchauffé la Terre de :

(0,45°C ± 0,18°C) x 16 GtCO2/1000 GtCO2 = 0,007°C ± 0,003°C.

Extrapolé à la prochaine décennie, le réchauffement de la Terre serait de 0,07°C ± 0,03°C, se situant ainsi au seuil de mesurabilité admis de la température. Autrement dit, un tel réchauffement sur une décennie est trop infime pour être correctement mesuré.

Extrapolé à 2050, année déclarée de l’objectif zéro émission, le résultat est de 0,2°C ± 0,08°C.

Ni 1°C, ni 2°C, ni 3° C, encore moins 5°C comme le prétendent certains médias alarmistes et les manifestants du climat qui n’ont probablement pas lu les rapports du GIEC, ou s’ils les ont lus, n’ont pas compris, obsédés qu’ils sont par la doxa alarmisme, mais seulement 0,2° C, une température que personne ne peut vraiment ressentir. Vous avez dit urgence climatique ?

La figure SPM.1b du rapport AR6 (figure 1) montre une hausse observée de la température d’environ 1°C d’un minimum vers 1965 à un maximum vers 2020. Le lissage des données mensuelles intègre le pic El Niño de 2016 et ses répliques, d’où un maximum dans lequel des phénomènes naturels jouent un rôle majeur.

SPM.1 Panel (b) : évolution de la température de surface mondiale de 1850 à 2020 (moyenne annuelle) observée et simulée tous facteurs confondus (courbe noire) et causée par les facteurs uniquement naturels (courbe verte)

La figure SPM.10 ci-dessous montre que les émissions cumulées de CO2 de 1965 à 2020 se sont élevées à environ 1400 GtCO2, dont 44 %, soit 616 GtCO2, seraient restées dans l’atmosphère.

Figure SPM.10 : émissions cumulées de CO2 (GtCO2) historiques and projetées selon les divers scenarios.

Toujours en appliquant les chiffres du GIEC, on peut ainsi reconstituer le réchauffement anthropique de 1965 à 2020 :

616 GtCO2/1000 GtCO2 x (0,45 °C ± 0,18 °C) = 0,28 °C ± 0,11 °C.

C’est beaucoup moins que l’observation de 1°C montrant que la variabilité naturelle du climat dépasse la contribution anthropique. Ce n’est pas un climato-réaliste qui le dit mais le GIEC lui-même, du moins implicitement.


Compléments du 17 janvier 2022

Cet article a suscité un certain nombre de réactions, ici synthétisées. La réponse de l’auteur se trouve en dessous.

Selon l’article, les chiffres donnés dans le dernier rapport du GIEC indiqueraient que la contribution humaine au changement climatique depuis 1965 serait de 0,28°C, soit 0,05°C par décennie, un chiffre bien inférieur au réchauffement de surface observé au cours de cette période (environ 0,18°C par décennie). Dans ces conditions le GIEC serait en contradiction avec ses propres évaluations selon lesquelles l’activité humaine pourrait expliquer entièrement le réchauffement observé.

Le rapport du GIEC dit : « Each 1000 GtCO2 of cumulative CO2 emissions is assessed to likely cause a 0.27°C to 0.63°C increase in global surface temperature with a best estimate of 0.45°C.» Dans l’article, le mot “cumulative” est pris dans le sens de “accumulé dans l’atmosphère”, si bien que les émissions annuelles sont systématiquement multipliées par la fraction aérienne (“airborne fraction”), c’est-à-dire la fraction des émissions humaines qui n’est pas absorbée par la végétation et les océans, et qui contribue à l’augmentation observée des concentrations de CO2 dans l’atmosphère (environ 44%). Or la définition des émissions cumulées donnée dans le résumé technique du GIEC est la suivante : « [Cumulative emissions are] the total net amount of CO2 emitted into the atmosphere as a result of human activities.» Autrement dit, les “cumulative emissions” sont la somme de toutes les émissions passées, quelle que soit la part de ces émissions absorbée par les puits terrestres et océaniques.

En d’autres termes, le réchauffement de 0,45°C par 1000 GtCO2 d’émissions cumulées ne se réfère qu’aux émissions, et non au CO2 qui s’accumule finalement dans l’atmosphère. Cette valeur de 0,45°C/1000 GtCO2 constitue ce que les climatologues appellent la «Transient Climate Response to Emissions (TCRE) ». On le voit dans la figure SPM.10 reproduite dans l’article, qui montre que les émissions totales cumulées entre 1850 et 2019 sont d’environ 2400 GtCO2. Cela correspond à la somme des émissions humaines durant cette période telle que donnée par le Global Carbon Project (Friedlingstein et al., “Global Carbon Budget 2021”, Earth System Science Data).

La TCRE ne doit pas être confondue avec la « Transient climate response » (TCR), qui est, elle, la réponse du climat à une augmentation lente de la concentration de CO2 de 1% par an, prise au moment du doublement de la concentration de CO2 (de 280 à 560 ppmv). Pour plus de détails entre TCR et TCRE, voir MacDougall, « The Transient Response to Cumulative CO2 Emissions : a Review », Current Climate Change Reports, 2016.

Un second point est que, pour faire les calculs, il convient de tenir compte des émissions de CO2 liées au changement d’affectation des terres (vraisemblablement essentiellement la déforestation) dans le total des émissions humaines, et non les seules émissions liées aux combustibles fossiles. Avec cette modification, les émissions humaines totales de CO2 en 2019 ne sont pas de 36 GtCO2 mais de 40,5 GtCO2 (voir à nouveau Friedlingstein et al.).

Avec ces nouveaux chiffres, le réchauffement induit par les émissions humaines de CO2 en 2019 est de (0,45 +- 0,18)/ 1000 GtCO2 * 43 GtCO2 = 0,018 +- 0,008 °C (et non de 0,007 +- 0,003 °C).

Par ailleurs, les émissions cumulées de CO2 depuis 1965 selon la figure SPM.10 ne sont pas de 1400 GtCO2 mais de 1 585 GtCO2 (source : Global Carbon Project). Finalement donc, en suivant le GIEC, le réchauffement dû aux émissions de CO2 de 1965 à 2019 serait de 0,45/1000*1585 = 0,71°C, soit 0,13°C par décennie.

 Cette estimation de 0,13°C par décennie est inférieure au réchauffement de surface observé d’environ 0,18°C par décennie depuis 1970, selon les sources de données habituelles (GISTEMP, HadCRUT, Berkeley). La différence est parfois expliquée par la réduction des émissions d’aérosols depuis 1965 sur une grande partie de l’hémisphère Nord, et par le fait que les émissions humaines de gaz à effet de serre ne sont pas faites que de CO2. On peut bien entendu contester tout cela, ainsi que la valeur de la TCRE proposée, toujours est-il que, sur les sujets évoqués dans l’article, le GIEC ne semble pas se contredire.


Réponse de François GERVAIS

La conclusion « chaque mille milliards de tonnes d’émissions de CO2 cumulées devraient réchauffer la Terre de 0,27°C à 0,63°C avec une meilleure estimation de 0,45°C » inscrite dans le marbre du paragraphe D.1.1 du Résumé pour les décideurs du rapport AR6 du GIEC semble susciter différentes interprétations. L’ambiguïté entretenue par le GIEC dans sa communication bien rodée provient du mot « cumulées ». Est-ce que l’on cumule les émissions ? Ou est-ce que l’on cumule la fraction des émissions qui reste dans l’atmosphère, la seule à pouvoir contribuer à réchauffer la Terre ? Le GIEC lui-même nous dit en effet que 56 % des émissions sont captées par les puits de carbone, entre parenthèse pour le plus grand bénéfice de la végétation en général et des plantes nutritives en particulier. La réponse permettant de lever l’ambiguïté nous est donnée par l’évolution de la proportion de CO2 dans l’atmosphère mesurée à l’Observatoire de Mauna Loa de la NOAA, la référence selon le GIEC. D’autres observatoires dans le monde donnent des valeurs très similaires. Les mesures ont commencé en 1959. Elles indiquaient alors 316 ppm (parties par million). La dernière valeur indiquée, lissée de l’oscillation saisonnière est de 416 ppm. Depuis 1959, 100 ppm ont ainsi été cumulés dans l’atmosphère. 1 ppm correspond à 7,8 milliards de tonnes de CO2 (GtCO2). Depuis 1959, 780 GtCO2 ont donc été ajoutés à l’atmosphère. La mesure à Mauna Loa nous le montre sans la moindre ambiguïté. La Figure SPM.10 indique un cumul nettement plus élevé depuis 1959. L’ambiguïté est ainsi levée. Ce n’est pas ce qui reste dans l’atmosphère et qui est donc susceptible de réchauffer la Terre, qui est présenté dans la figure.

De 2000 à 2015, avant le pic El Niño de 2016, les mesures à Mauna Loa indiquent une augmentation moyenne de 2 ppm par an. C’est la valeur confirmée de 2020 à 2021. Deux fois 7,8 GtCO2 donne à peu près 16 GtCO2 ajoutés à l’atmosphère en 2021. Non pas 36 GtCO2 émis, encore moins 40,5 GtCO2, mais bien 16 GtCO2 comme nous le précise là encore la mesure. A noter que 16/36 = 44 %. On retrouve bien « l’airborne fraction », la fraction de CO2 qui reste dans l’atmosphère, indiquée par le GIEC.

De quelle fraction de degré ces 16 GtCO2 ajoutés annuellement à l’atmosphère ces derniers temps la réchauffe-t-elle ? Si l’on prend une sensibilité climatique inférieure à 1°C en se référant à un corpus de plus de 100 travaux publiés dans des revues internationales à comité de lecture que pour autant le GIEC se garde bien de citer, le réchauffement annuel serait inférieur à 16/3250 x 1°C = 0,005°C. La sensibilité climatique indique de combien de degrés la Terre se réchaufferait si la concentration de CO2 doublait dans l’atmosphère. Il y en a actuellement 417 ppm, donc 3250 GtCO2 dans l’atmosphère. Au rythme d’augmentation de 16/3250 = 0,5 % par an, le doublement attendra, vraisemblablement au-delà de la fin de ce siècle. On peut trouver la liste de ces plus de 100 travaux publiés et ignorés du GIEC dans ma dernière publication dans Science of Climate Change.

Les modèles de climat CMIP6 repris par le GIEC donnent une meilleure estimation de sensibilité climatique TCRE de 1,65°C, mais avec une fourchette d’incertitude encore trop large car les modèles ne sont pas d’accord entre eux. La phrase du GIEC ne fait logiquement que transcrire l’impact d’une telle valeur comme il le rappelle en note de bas de page. En effet 1,65°C x 1000/3250 donne l’estimation d’à peu près un demi-degré indiquée par le GIEC.

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12 réflexions au sujet de « Vous avez dit urgence climatique ? »

  1. Il y a longtemps que tout scientifique un tant soit peu sérieux sait que le CO2 ne peut avoir le rôle catastrophique que certains veulent lui attribuer. Ce gaz influence que très modestement le climat, cela est principalement dû à sa structure chimique et à sa capacité d’absorption dans l’IR qui est presque saturée, reste donc les “bords de la courbe”.

    Cependant nos sociétés ont adoubé ce marqueur, que l’on retrouve maintenant partout, jusque dans les malus pour les automobiles… Il s’agit là de politique et pas de science. De grands intérêts se retrouvent sur le fait de mettre en exergue le carbone, afin d’une part de lever des impôts sous couvert d’écologie, d’autre part de forcer la main à la population pour renouveler ses achats (voiture, électroménager, maison,…), et enfin, les ecolo-communistes y voient un excellent moyen de continuer le combat contre le capitalisme et la société occdientale, car toutes les entreprises du monde émettent du CO2 : interdisez le CO2 et vous ferez écrouler la société…

    • Trop drôle. Comme si les politiques avaient besoin de trouver des excuses scientifiques pour réaliser des prélèvements obligatoires et de réaliser un complot mondial où se retrouve les pays de l’OPEP+ (23 pays dont les émirats et la Russie !) qui ont tout à perdre de la décarbonation de l’économie . . . comme tous les particuliers, collectivités et entreprises, de transports jusqu’à la plasturgie, en passant par l’agrochimie (engrais azotés, pesticides, ….) et le tourisme (compagnies aériennes, hôtellerie, …).
      Trop fort les marchand d’éoliennes (Danois et Allemands, …), de panneaux photovoltaiques et de batteries automobiles (Chinois, …).

  2. Dans cet article, Monsieur Gervais semble avoir découvert une incohérence dans le dernier rapport du GIEC. Il conclut en substance que, selon les chiffres donnés dans ce rapport, la contribution humaine au changement climatique depuis 1965 est de 0,28°C, soit 0,05°C par décennie. Si c’était vrai, ce chiffre serait bien inférieur au réchauffement de surface observé au cours de cette période (environ 0,18°C par décennie), et il serait donc en contradiction flagrante avec l’évaluation du GIEC selon laquelle l’activité humaine peut expliquer entièrement le réchauffement observé.

    Malheureusement, Monsieur Gervais a commis plusieurs erreurs majeures qui invalident complètement son article. Je vais le démontrer dans ce qui suit. Pour être clair, mon intention n’est pas d’approuver les conclusions du GIEC – je veux juste préciser que l’article de Monsieur Gervais est fondamentalement erroné, et que, en particulier, il ne révèle pas d’incohérence dans le rapport du GIEC.

    Le rapport du GIEC, tel que cité par Monsieur Gervais, dit : “Each 1000 GtCO2 of cumulative CO2 emissions is assessed to likely cause a 0.27°C to 0.63°C increase in global surface temperature with a best estimate of 0.45°C.” . Monsieur Gervais a pris le mot “cumulative” pour signifier “accumulé dans l’atmosphère”, et a donc systématiquement multiplié les émissions annuelles par la fraction aérienne (“airborne fraction”), c’est-à-dire la fraction des émissions humaines qui n’est pas absorbée par la végétation et les océans, et qui contribue à l’augmentation observée des concentrations de CO2 dans l’atmosphère (environ 44%). C’est faux, comme le montre la définition des émissions cumulées donnée dans le résumé technique du GIEC : “[Cumulative emissions are] the total net amount of CO2 emitted into the atmosphere as a result of human activities.” . Autrement dit, les “cumulative emissions” sont simplement la somme de toutes les émissions passées, quelle que soit la part de ces émissions absorbée par les puits terrestres et océaniques. En d’autres termes, le réchauffement de 0,45°C par 1000 GtCO2 d’émissions cumulées ne se réfère clairement qu’aux émissions, *PAS* au CO2 qui s’accumule finalement dans l’atmosphère. Cette valeur, 0,45°C/1000 GtCO2, est ce que les climatologues appellent la “Transient Climate Response to Emissions (TCRE)”, et c’est manifestement un concept que Monsieur Gervais ne connaît pas. Ceci est également visible dans la figure SPM.10 reproduite par Monsieur Gervais, où l’on peut facilement lire que les émissions totales cumulées entre 1850 et 2019 sont d’environ 2400 GtCO2. Cela correspond à la somme des émissions humaines durant cette période telle que donnée par le Global Carbon Project (Friedlingstein et al., “Global Carbon Budget 2021”, Earth System Science Data, 2021 – un article beaucoup cité par notre contributeur “MD” dans un récent billet intitulé “Carbone, etc”).

    (Monsieur Gervais semble confondre la « Transient climate response to emissions » (TCRE) avec la “Transient climate response” (TCR). Les deux ne sont pas la même chose, même si on peut facilement confondre les deux car les expressions sont similaires. La différence est très clairement expliquée par MacDougall dans l’article “The Transient Response to Cumulative CO2 Emissions : a Review”, publié dans Current Climate Change Reports en 2016. La “TCR” est la réponse du climat à une augmentation lente de la concentration de CO2 de 1% par an, prise au moment du doublement de la concentration de CO2 (de 280 à 560 ppmv)).

    Une deuxième erreur surprenante commise par Monsieur Gervais est qu’il n’a pas pris en compte les émissions de CO2 liées au changement d’affectation des terres (vraisemblablement essentiellement la déforestation) dans le total des émissions humaines – il n’a pris en compte que les émissions liées aux combustibles fossiles. Par conséquent, les émissions humaines totales de CO2 en 2019 ne sont pas 36 GtCO2 comme il l’a écrit, mais 43 GtCO2 (les chiffres proviennent à nouveau de Friedlingstein et al., 2021 ; les chiffres du budget carbone peuvent être téléchargés dans un fichier Excel).

    Une fois ces erreurs corrigées, le réchauffement induit par les émissions humaines de CO2 en 2019 est de (0,45 +- 0,18)/ 1000 GtCO2 * 43 GtCO2 = 0,019 +- 0,008 °C. (Monsieur Gervais a calculé à tort 0,007 +- 0,003 °C).

    Monsieur Gervais calcule ensuite le réchauffement induit par les émissions humaines depuis 1965, mais 1) il commet à nouveau l’erreur de multiplier les émissions cumulées par 44 %, et il lit incorrectement les émissions cumulées depuis 1965 dans la figure SPM.10 car l’échelle logarithmique est un peu compliquée à interpréter. Les émissions cumulées de CO2 entre 1965 et 2019 ne sont pas de 1400 GtCO2 comme il écrit, mais de presque 1600 (1585 GtCO2, pour être précis – encore une fois, les données proviennent du Global Carbon Project cité par MD). En suivant le GIEC sans faire ces erreurs, le réchauffement dû aux émissions de CO2 de 1965 à 2019 serait donc de 0,45/1000*1585 = 0,71°C, soit 0,13°C par décennie, et non 0.28°C (donc 0,05°C par décennie) comme le calcule à tort Monsieur Gervais.

    Cette estimation de 0,13°C par décennie est inférieure au réchauffement de surface observé d’environ 0,18°C par décennie depuis 1970, tel que donné par les jeux de données habituels (GISTEMP, HadCRUT, Berkeley), mais pas tant que ça. La différence (entre 0.13 et 0.18) pourrait peut-être (si l’on croit les climatologues) s’expliquer par la réduction des émissions d’aérosols depuis 1965 sur une grande partie de l’hémisphère Nord, qui entraîne un réchauffement, et par le fait que les émissions humaines ne sont pas seulement du CO2, mais aussi du CH4 et d’autres gaz. Il n’y a donc pas de contradiction évidente dans le rapport du GIEC.

    Pour être clair, je ne dis pas que la TCRE donné par le GIEC ne peut pas être fausse – je dis simplement que Monsieur Gervais a fait plusieurs erreurs majeures dans son article et que ses conclusions sont fausses. La principale erreur est due au fait que Monsieur Gervais a manifestement mal interprété le concept de “Réponse transitoire du climat aux émissions” (TCRE), qui, comme le nom l’indique, n’est pas une réponse aux concentrations mais aux émissions. Le rapport du GIEC est cohérent avec lui-même. L’estimation du réchauffement induit par les émissions de CO2 est proche du réchauffement observé.

    • Oui la confusion entre CO2 restant dans l’atmosphère et CO2 émis est facile à faire étant donné les mots ambigus choisis dans les rapports du Giec.

      Avec les données du Giec AR6 :
      100 ppm atmosphérique correspond à + 0.8 °C (en fait de + 0,477 °C à + 1,12 °C)
      (100 ppm émis -> 0,352 °C or 44% reste dans l’atm donc 100 ppm atm correspond à 100 x 0.352 /44 = 0.8 °C : voir page SPM 36 : “Each 1000 GtCO2 of cumulative CO2 emissions is assessed to likely cause a 0.27°C to 0.63°C increasein global surface temperature with a best estimate of 0.45°C”)
      De 1750 à 1850 : + 0,2 °C d’après AR6
      De 1850 à 2019 : + 1,07 °C d’après AR6 (dont 1.01 °C dû au CO2 anthropique et ses rétroactions entre 1750 et 2019)
      Entre 2018 (410 ppm de CO2) et 2100 (574 ppm de CO2) = 164 ppm
      Comme 100 ppm atm correspond à 0.8 °C d’après AR6, alors la différence de T° entre 1850 et 2018 (82 ans) : part du CO2 (CO2 anthropique + rétroactions du CO2) : 164 x 0.8 °C / 100 = 1.31 °C.
      T° du globe en 2018 : 14.68 °C d’après l’OMM donc 14.68°C + 1.31 °C = 15.99 °C en 2100.
      C’est beaucoup 16 °C en moyenne sur Terre ? Bof… pas sûr.

    • Bonjour Arsène

      j’ose une question: et si le GIEC avait fait ses calculs en partant du postulat que tout le réchauffement ou presque est liée aux émissions anthropiques ?
      On a +0.7°C entre1965 et 2019, on a 1585 Gt de CO2 émis donc on en déduit la sensibilité climatique.

      C’est l’impression que ça donne surtout quand on sait que de nombreuses études font état d’une sensibilité climatique très inférieure.

      Qu’en pensez-vous

  3. Bonjour
    J’avoue être déstabilisé par cet article de francois Gervais. Cela serait merveilleux si cette analyse se révélait exacte, je ne demande qu’à croire Mr Gervais!
    Cela m’amène une question (n’étant aucunement spécialiste du climat, celle ci vous semblera bien naïve):
    Ne confond-t-on pas flux et stock?
    Si l’on stoppait toutes les émissions de CO2, y aurait-il encore réchauffement du fait du stock?
    Lorsque le GIEC présente ses calculs, ne faut-il pas comprendre “augmentation SUPPLEMENTAIRE” de température par rapport à un réchauffement en cours?

    Addendum: je viens de lire la remarque précédente, qu’il me faut analyser dans le detail: Ne répond t elle pas a mes questionnements❓

    • Bonjour Jean-François,

      Vous posez la question du “zero emissions commitment” : la question de savoir si, lorsqu’on passe à 0 émissions de CO2, la température continuera à augmenter ou pas, et si oui, pour combien de temps. Toujours en sachant/croyant/supposant (barrer les mentions inutiles) que le CO2 a un effet…

      Voici ce qu’en dit le résumé technique du dernier rapport du GIEC : “Based on idealized model simulations that explore the climate response once CO2 emissions have been brought to zero, the magnitude of the zero CO2 emissions commitment (ZEC, see Glossary) is assessed to be likely smaller than 0.3°C for time scales of about half a century and cumulative CO2 emissions broadly consistent with global warming of 2°C. However, there is low confidence about its sign on time scales of about half a century.”

      Et le glossaire dit bien : “The zero emissions commitment is an estimate of the subsequent global warming that would result after anthropogenic emissions are set to zero. […]”

      En fait, si j’ai bien compris, ils pensent que deux effets se compensent à peu près :
      1) L’inertie du climat (qui tenderait à continuer à réchauffer le climat si la concentration de CO2 restait constante), et
      2) si on arrêtait d’émettre du CO2, la concentration de CO2 baisserait parce que les océans et la végétation continueraient à absorber du CO2, ce qui baisserait la concentration de CO2.

      Résultat combiné : 0 plus ou moins 0.3°C après l’arrêt des émissions.

      Bien sûr, si le CO2 n’avait aucun effet sur le climat, on aurait le même résultat… 0, en négligeant évidemment les variations naturelles.

      (Et évidemment, je peux me tromper – la lecture des rapports du GIEC est ardue…)

  4. Merci Arsène pour votre réponse. Je ne peux que louer votre connaissance détaillée des rapports du GIEC. Je me permets de résumer(à grands traits) la polémique que vous soulevez sur l’article de Monsieur Gervais:
    1- monsieur Gervais se place dans la logique “réchauffiste du GIEC ( augmentation du stock de CO2 exclusivement entropique, réchauffement constaté exclusivement dû à l’augmentation du stock de CO2 par forçage radiatif), et extrapole les chiffres donnés par le GIEC pour en déduire un réchauffement largement inférieur aux prévisions “alarmistes” du GIEC. Il conteste donc la COHERENCE des calculs du GIEC.
    2- nous savons par ailleurs que Mr Gervais se situe dans une logique “sceptique” (augmentation du stock de CO2 non corrélée aux flux entropiques de CO2, augmentation de température non corrélée a cette croissance du stock de CO2).
    Il conteste donc la PERTINENCE de l’analyse du GIEC sur le réchauffement en cours.
    3- En introduisant la subtile notion de TCRE, tirée des rapports du GIEC, vous contestez absolument les extrapolations de Mr Gervais. Vous rétablissez donc la COHERENCE des calculs du GIEC, concernant le réchauffement passé et présent (vous ne dites rien des projections du GIEC).
    4- Vous ne dites rien de la PERTINENCE de l’analyse du GIEC sur le réchauffement en cours.
    5- Enfin, concernant ma dernière question, portant sur les évolutions de température suite à un arrêt des émissions entropiques, vous me citez la réponse du GIEC (plus d’augmentation après une période de latence). La réponse que me donnerait Mr Gervais serait bien évidemment différente.

    Ai-je bien résumé ?

    • Bonjour Jean-François,

      Oui, vous avez bien résumé. Je fais remarquer que François Gervais a mal compris les phrases du Résumé à l’Intention des Décideurs du GIEC – il leur fait dire ce qu’ils ne disent pas. Je ne défends pas le contenu du rapport en tant que tel.

      Concernant le “zero emission commitment”, je vous ai dit ce qu’en disait le GIEC (du moins ce que j’en ai compris) parce que j’ai crû comprendre que votre question portait sur comment il fallait comprendre ce rapport. Là encore, je ne prends pas la défense du rapport. Je dis juste ce qu’il dit, je ne dis par que ce qu’il dit est juste.

      Mais vous avez bien déviné que je ne suis pas (encore ?) un “climato-sceptique” convaincu. Et le fait de découvrir des erreurs de compréhension fondamentales chez Monsieur Gervais ne va pas aider à me convaincre.

      Pourtant, j’aimerais bien pouvoir croire qu’on peut sans souci continuer à utiliser les combustibles fossiles. Force est de constater que l’utilisation du pétrole, du charbon et du gaz naturel est la base de notre richesse actuelle, même si elle induit une dépendance stratégique envers des pays franchement pas “recommendables” (Russie, Arabie Saoudite).

  5. Mr Gervais s’est livré à un exercice très périlleux, qui consiste à revisiter les conclusions du GIEC avec les lunettes d’un climato sceptique: au moins a-t-il essayé.
    Le lien de causalité exclusif entre l’élévation de température de l’ére Industrielle et les flux cumulés de CO2 entropique semble constituer le socle indéboulonnable de l’édifice théorique bâti par le GIEC depuis 50 ans.
    Les chiffres (1 degré environ d’élévation, 2400 GT de flux cumulés) sont inattaquables.
    C’est sur la base de ces chiffres incontestables que le GIEC prétend extrapoler le futur climatique, en utilisant (de manière contestable?) La notion de flux cumulés plutôt que la concentration en CO2.

    S’attaquer à la cohérence du bloc bâti par le GIEC sans remettre en cause le précédent lien de causalité exclusif me semble voué à l’échec.
    Il semble que les contributeurs de ce site l’ont confirmé, en faisant paraître en même temps que les réponses de Mr Gervais un article sur ce lien flux cumulés/temperatures vu par le GIEC.

    • “Les chiffres (1 degré environ d’élévation, 2400 GT de flux cumulés) sont inattaquables.”

      Il est bon quand on entend développer un raisonnement de s’assurer de la solidité des fondations, pour cela, il faut se méfier comme de la peste des idées préconçues. A mon humble avis, vous n’avez pas creusé assez profond. Votre opinion est que le 1 °C est inattaquable. Qu’est-ce qui vous le laisse croire ? La première figure de l’article ci-dessus ? Avez-vous une idée de la façon dont cette courbe est calculée ? Pensez-vous que 1 °C est la différence entre les mesures des températures actuelles et celles mesurées il y a 50 ans ?

      Il vaut mieux ne pas tenir pour certain des chiffres dont on ne connaît pas ce qu’ils représentent réellement. En l’occurrence, rien n’est moins bien établi que ce 1 °C. Peu n’est plus certainement faux.

  6. D’autres réflexions sur ces différents écrits(comprenant cette très intéressante publication dans science of climate change) de Mr Gervais: je ne cherche pas à polémiquer, je n’en ai pas les compétences: je veux juste mieux comprendre, comme la majorité du public que je représente. Je pense que la taille des enjeux vaut bien ces quelques lignes.

    1- parler de sensibilité climatique, implique-t-il la reconnaissance de facto du réchauffement atmosphérique par le CO2?

    2- je cite: ” Si l’on prend une sensibilité climatique inférieure à 1°C en se référant à un corpus de plus de 100 travaux”.
    A quel type de théorie du réchauffement climatique ces travaux se referent-ils? Il est fait mention de (je cite); “The second estimate is based on infrared thermal emission spectra of atmospheric CO2 near the tropopause “.
    Puisque Mr Gervais fait référence dans ce même document aux évaluations de sensibilité par le GIEC, (plus élevées, à 1.65 °C) , j’en déduis que les méthodes d’observation ou de calcul différent: y fait-on référence au forçage radiatif?

    3- Mr Gervais écrit dans son document édité dans “science of climate change” (je cite): “The correlation of (i) monthly temperature fluctuations measured by UAH at the Earth’s surface and (ii) CO2 increases in the atmosphere that lag temperature fluctuations instead of driving them, is updated and discussed.”
    On retrouve là l’analyse (ou un débat sur l’analyse) climato sceptique classique de l’élévation du taux de CO2 dans l’atmosphère, conséquence et non cause du réchauffement.
    MAIS précédemment dans son commentaire il démontre par les observations effectuées à l’observatoire de Mauna Loa que la concentration de CO2 est une fonction linéaire (coefficientee par l’airbone fraction) des flux de CO2 anthropique: linéaire, donc causale ou corrélée?

    4- n’ayant pas accès aux études basées sur l’IR près de la tropopause, j’aurais aimé savoir si celles-ci incluent une part substantielle de rechauffement naturel, s’ajoutant aux effets du CO2 anthropique.

    Quelqu’un peut-il me répondre ?

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