Rémy Prud’homme
Le moyen-âge connut (au moins en Europe occidentale) une période de réchauffement du climat. Du onzième au quatorzième siècles, les températures étaient, semble-t-il, plus élevées que de nos jours. Cette période, celle des cathédrales, fut prospère. A partir du quinzième siècle, en revanche, on entre dans une période de refroidissement du climat. Le froid et la pluie affectent gravement les productions agricoles (qui constituent l’essentiel de l’activité économique), entrainant maladies, famines, misère et mortalité. Les populations et les élites établissent très clairement le lien entre ces malheurs et le refroidissement. Il leur faut absolument identifier les causes – si possible, la cause – de ce changement du climat, afin d’y porter remède.
La cause « identifiée » par les autorités religieuses, alors toutes-puissantes, c’est la sorcellerie : les sorciers, et surtout les sorcières, passent un pacte avec le Démon, qui répand le froid qui détruit les récoltes. Le remède, c’est la persécution des sorcières. Cette réaction prit notamment la forme d’une bulle du pape Innocent VIII intitulée Sumis desiderantes affectibus », et datée de 1484. Les coupables y sont clairement mentionnés : « les sorciers et sorcières responsables du refroidissement du climat ». La politique à mettre en œuvre consiste à demander expressément à l’Inquisition « d’enquêter afin de définir les signes auxquels on peut reconnaître le pacte d’un individu avec le démon ». L’Inquisition, une institution ecclésiastique chargée de combattre l’hérésie et les hérétiques, existait avant cette date, principalement en Allemagne et en Espagne. Elle se réorienta volontiers vers les prétendus « responsables du refroidissement du climat ». Des dizaines de milliers de femmes innocentes, parfois un peu libres ou non-conformistes, furent arrêtées, incarcérées, torturées, sorciérisées, et mises à mort, souvent brûlées vives.
Il est difficile de ne pas rapprocher cette chasse aux sorcières du quinzième siècle de l’écologisme militant qui sévit depuis un demi-siècle. On évoquera trois similitudes.
Primo, les deux épisodes ont une source comparable : le refroidissement d’un côté, le réchauffement de l’autre, c’est-à-dire un changement du climat. Ce changement surprend, effraye, interroge, inquiète. Les autorités, c’est-à-dire l’Eglise hier, et l’Etat aujourd’hui, se sentent obligées d’intervenir. En réalité d’ailleurs l’Eglise intervient aussi aujourd’hui : l’encyclique Laudato Si du pape François fait écho à la bulle Sumis desiderantes affectibus du pape Innocent VIII.
Secundo, dans les deux cas, on cherche, et on trouve, un bouc émissaire explicatif du changement climatique : la sorcellerie au quinzième siècle, le CO2 anthropique au vingtième siècle. Les preuves de relations causales sont inexistantes ou fragiles, mais à force d’être répétées, elles finissent par emporter la conviction, ou plus exactement la croyance.
Tertio, de la connaissance de la cause à l’identification de l’ennemi public n°1 et aux actions à entreprendre, il n’y a qu’un pas, vite franchi dans les deux épisodes. Pour lutter contre le refroidissement, il faut, et il suffit, de débusquer les sorcières, de les torturer pour qu’elles avouent leur commerce avec le diable, et de les exterminer. Si elles n’avouent pas, leur déni est un considéré comme une preuve de culpabilité, et mérite aussi la mort. Pour lutter contre le réchauffement, il faut, et il suffit, de pourchasser les rejets de CO2 et ceux qui les émettent, et de les empêcher de nuire. La bonne foi des inquisiteurs et des ONG écologiques est entière (c’est une foi). Ils agissent pour sauver des âmes ou pour protéger la planète, ce qui légitime tous les moyens qu’ils emploient. Pour eux, l’intolérance est une vertu.
On peut, avec le recul dont on dispose, mentionner une quatrième similitude : dans les deux cas, les politiques engagées n’ont eu pratiquement aucun impact sur le climat. La chasse aux sorcières n’a nullement freiné le refroidissement du quinzième siècle. La chasse au CO2 n’a pas davantage arrêté le réchauffement. Dans les deux cas, mauvais diagnostic, mauvaise thérapie, mauvais résultat.

Les rédacteurs du GIEC supposent que l’essentiel (au moins 50%, mais en réalité 90% ou plus) du « réchauffement climatique » est causé par le dioxyde de carbone et que chaque doublement produit un réchauffement estimé à environ 3 °C. C’est la sensibilité climatique, estimée à entre 2,5 et 6 °C. Ces suppositions correspondent à un « climat » qui sur le long terme (30 ans ou plus) ne dépend que du logarithme des concentrations partielles de dioxyde de carbone.
Le GISS (NASA) publie des estimations de la concentration de dioxyde de carbone depuis 1850.
La Climatic Research Unit (CRU) publie des estimations de la « température globale » sur la même période.
Il est intéressant de comparer les augmentations de température annuelle publiées par le CRU avec les augmentations du logarithme du ratio des températures sur la même période, pour trouver le coefficient de proportionnalité.
Si l’on fait l’exercice, on trouve qu’il n’y a aucune relation entre les deux. Les températures estimée par le CRU et les logarithmes des concentrations de CO2 estimée par le GISS varient de façon totalement indépendante.
L’hypothèse d’une proportionnalité d’au moins la moitié est invalidée par les observations.
Je conseille à tous la lecture d’un excellent site http://geneadom.free.fr/actes_meteo.htm
Pour comprendre les compilations de ce site, il faut savoir qu’avant la révolution française, ce sont les curés qui tenaient « les registres d’état civil », alors appelés registres de baptêmes, mariages et sépultures. Selon les régions et les lieux de France, nos archives possèdent des séries plus ou moins complètes depuis le XVIème ou plus souvent le XVIIème siècle.
Certains curés (une petite minorité) avait l’habitude de consigner en 1ère ou dernière page un résumé de l’année écoulée. Dans une France agricole à 80% où disettes et famines ne sont jamais loin, la météo de l’année et ses innombrables caprices étaient donc un sujet constant.
Ce site répertorie de façon brute, les pages inventoriées de ces registres en les groupant par département et par année puis par paroisse. Et pour les novices en écritures anciennes, les pages ont été retranscrites à côté des documents originaux.
Ceux qui s’imaginent que nos ancêtres vivaient paisiblement dans un monde avec printemps, été, automne et hiver, façon images d’Epinal, vont tomber de leur chaise.
A lire aussi « Barrages, réservoirs et crues de la Seine » de Denis Coeur sorti récemment.
Il s’inspire en partie des recherches de l’ingénieur Belgrand, directeur du service des eaux et des égouts du Préfet Haussmann « Des travaux souterrains de Paris » consacré aux « Anciennes eaux », paru en 1877 et le tome IV « Les eaux nouvelles » paru en 1882. Ces 2 derniers ouvrages sont accessibles directement sur Gallica pour ceux qui voudrait connaitre le sujet à fond. Ce sont des chefs d’oeuvre de précisions. Ils retraçent l’histoire de la gestion de l’eau à Paris d’après la retranscription de documents d’archives administratives entre 1500 et la révolution française.
Ecrit avant l’âge d’Internet et l’accès facile à une documentation massive, il y a un pan immense de documentation que Leroy Ladurie n’a pas utilisé en son temps.
Merci pour ces refs.
voici également des relevés de températures un peu partout dans le monde, certaines stations remontant assez loin dans le temps. mais les relevés s’arrêtent dans les années 90, début 2000.
http://www.john-daly.com/stations/stations.htm#Europe
Bravo pour votre article qui démontre magistralement que malgré les énormes avancées scientifiques, le cerveau humain est resté le même et que l’esprit critique n’est pas plus répandu qu’au Moyen Age.
Il y a plus de 10 ans, j’ai entendu une conférence d’un glaciologue qui parlait du changement climatique (par le biais de glaciers), devant un auditoire convaincu des propos du GIEC / media et ONG. A la fin, comme j’étais déjà un peu instruit, j’ai posé deux questions perfides:
1- Quel crédit donner aux modélisations du climat futur? réponse: « elles dépendent énormément des conditions initiales ». Pas bien compris au début, mais bien retenu.
2 – quel ouvrage de référence pour se faire une idée objective du climat? réponse: »l’ histoire du climat depuis l’an mil, d’E. Leroy-Ladurie ». J’ai acheté et dévoré ce livre
En conclusion, cet homme avait donné, au delà d’un discours favorisant l’alarmisme, deux clés pour conforter le réalisme en moi et ensuite le cultiver
Quand je les comprends (certains me dépasse parfois un peu…), je suis quasi toujours d’accord avec les articles de ce site ; l’association fait un excellent travail dont je me réjouis qu’il semble peu à peu gagner en audience.
Je n’en suis que plus à l’aise pour trouver que cet article, pour une fois, manque de preuves sourcées en ce qui concerne le Moyen-Age. Je me suis reporté à wikipedia sur la bulle en question: son objet ne semble pas être le climat et ses origines ? en outre, d’où tirez-vous le chiffre de dizaines de milliers de « sorcières » ?
Au reste, ce genre de comparaison n’a guère d’interêt dans la lutte contre l’obscurantisme climatique qui est, lui, bien d’aujourd’hui. Sinon de distraire l’attention du problème !
Ne nous laissons pas aller aux mêmes pratiques détestables que nos « adversaires ».
Bonjour !
« Le moyen-âge connut (au moins en Europe occidentale) une période de réchauffement du climat. Du onzième au quatorzième siècles, les températures étaient, semble-t-il, plus élevées que de nos jours. »
Très fort. Tout ça sans aucune référence au moindre travail scientifique. Je me permets de vous fournir une référence : Büntgen et al., « 2500 Years of European Climate Variability and Human Susceptibility », Science, 2011, https://www.science.org/doi/10.1126/science.1197175. Manque de pot pour vous, ce travail montre clairement que le réchauffement récent dépasse de loin la gamme des températures vues au cours des derniers 2500 ans.
A vous de décider ce que vous voulez mettre à la poubelle : un post sans aucune référence sur un blog obscur, écrit par une personne sans aucune compétence prouvée en géosciences, ou un article scientifique par un groupe de scientifiques reconnus, multi-primés et multi-cités, dans un des plus prestigieux journaux scientifiques. Mais gardez en tête que le choix que vous faites dit surtout quelque chose sur vous.
Lisez Le ROY Ladurie
Bonjour Anton,
C’est pas bien ça, de ramener la pseudoscience des paléo climatologues.
Je rappellerai une vérité toute simple : aucune observation ne confirme une fin de XXème siècle plus chaude que le Moyen-Age. Büntgen, s’il est honnête, doit l’avoir mentionné dans son article. Non ?
Ces gens s’amusent à coller les indices de températures, qui ne remontent pas plus loin que le milieu du XIXème, aux proxies de la température.
Or, et c’est systématique, les proxies dont on peut démontrer la qualité ne montrent pas de comportement récent particulier. Réchauffement, oui, mais ne dépassant pas ou peu les valeurs du Moyen Age.
Il est parfaitement évident que proxies et indices de surface ne rendent pas compte de la même grandeur car ils ont un comportement très différent depuis la première moitié du XXème siècle.
Cela dit, si vous avez des données d’observations sérieuses qui me contredisent, je suis preneur. Il y a 15 ans que j’en demande et je n’ai jamais rien vu (je crois d’ailleurs vous avoir sollicité plusieurs fois à ce propos sans succès).