Feux à Hawaï : comment s’expliquent les incendies exceptionnels qui ont ravagé Maui ?

Trois feux ont ravagé l’île Maui la deuxième plus grande île de l’archipel américain d’Hawaï. La ville historique de Lahaina, une station balnéaire de 12.000 habitants a été presque entièrement dévastée. Ces feux ont causé la mort d’au moins 67 personnes.

L’efficacité du système d’alerte à Hawaï est mise en cause. Selon RTL, le numéro d’urgence 911 ne fonctionnait pas dans certaines zones au moment du sinistre et Maui a été victime de coupures de courant et de réseau massives. Les sirènes censées retentir en cas d’incendie n’ont pas été actionnées.

Comment une telle situation a-t-elle pu se produire dans un cet archipel humide au milieu de l’océan Pacifique ?

Hawaï est l’un des États des USA les plus sujets aux incendies

Tout d’abord, rappelle le météorologue Cliff Mass, Hawaï est l’un des États les plus sujets aux incendies aux États-Unis (voir la figure 1 ci-dessous). Les différentes îles d’Hawaï sont touchées tous les ans ou presque par des incendies. En 2018 et en 2022, l’île de Maui avait déjà subi des feux importants. Selon le Dr Clay Trauernicht, professeur de gestion des ressources naturelles et de l’environnement à l’Université d’Hawaï, au cours de la dernière décennie, une moyenne de 5000 feux de forêt ont brûlé près de 18 000 hectares chaque année.

La carte ci-dessous montre certains incendies historiques subis par Hawaï.

Cartes des feux de forêt pour chacune des six principales îles hawaïennes. Les points rouges indiquent les points d’allumage des feux. Les points plus grands indiquent des incendies plus importants en termes de superficie. Source : Hawaii Wildfire Management Organization

De plus, Lahaina est située du côté sous le vent des montagnes de Maui. Ces hautes terres essorent l’humidité transportée par les alizés, avec seulement 38 cm de pluie tombant à Lahaina contre 760 cm sur les montagnes à l’est.

Avec des alizés persistants de l’est ou du nord-est, le côté Est de l’île hawaïenne est assez humide (avec un flux ascendant humide), tandis que les côtés sous le vent (ou Kona) sont secs comme le montre la carte des précipitations des îles hawaïennes ci-dessous.

Précipitations moyennes à Hawaï (Source : Cliff Mass)

C’est pourquoi les gens passent leurs vacances à Kona (Big Island), Lahaina (Maui) ou Poipu Beach (Kauai), où un temps chaud et sec domine.

La végétation : des graminées hautement inflammables

Après des décennies de déclin de l’agriculture (abandon des plantations d’ananas et de canne à sucre de Maui), des plantes, invasives et hautement inflammables ont été introduites par les habitants. Un quart de l’archipel (36% dans le comté de Maui) est maintenant recouvert par des arbustes non indigènes fournissant le carburant pour des incendies de forêt de plus en plus étendus et violents.

Les experts en incendie classent ces graminées de petit diamètre comme des combustibles à décalage d’une heure, ce qui signifie qu’en une demi-journée de temps sec, ces graminées deviennent hautement inflammables, permettant aux incendies de se propager rapidement même avec des vents modérés. Les graminées annuelles meurent généralement pendant la saison sèche qui à Maui dure généralement du 25 mai au 15 juillet environ .

Un printemps 2023 plus frais et plus humide que la normale

Cela est contre intuitif, mais les saisons humides créent un risque d’incendie plus élevé en augmentant l’abondance d’herbes mortes pour la saison sèche. Le printemps 2023 a été plus frais et plus humide que la normale, alimentant une forte charge de carburant dans l’herbe.

Les cartes ci-dessous montrent (respectivement) l’écart des précipitations (figure 2) et des températures (figure 3) par rapport à la normale au cours des six derniers mois (en pouces). 

 Figure 2 : Précipitations du 9 février au 8 août 2023 (source Cliff Mass)
Figure 3 : Températures du 9 février au 8 août 2023 (source Cliff Mass)

Western Maui a ainsi connu ces six derniers six derniers mois des conditions plus humides et plus fraîches que la normale. Cet excès d’humidité s’explique par plusieurs puissantes tempêtes (dépression de Kona) qui ont eu lieu cet hiver.

Des alizés persistants exacerbés par l’ouragan Dora

Hawaï reçoit fréquemment des alizés persistants provenant de l’est ou du nord-est. Le côté Est de l’île hawaïenne est donc assez humide, tandis que les côtés sous le vent (ou Kona) sont secs.

Des alizés très forts se sont développés en raison d’une gradient de pression important entre un puissant anticyclone subtropical d’une part une dépression au sud créée par l‘ouragan de catégorie 4 Dora qui a frappé l’archipel hawaïen avec des vents dépassant les 200 km/h. Les vents de l’ouragan ont été canalisés entre ces deux systèmes météo et ont contribué à attiser les flammes.

De plus, après être passé au-dessus de la chaîne de montagnes, le vent s’est renforcé en redescendant et il est devenu plus sec. Même s’il se situait à plus de 1 000 kilomètres de l’île, !’ouragan Dora est ainsi un facteur explicatif des feux.

Pour résumer, ces feux exceptionnels sont dus à la conjonction de plusieurs facteurs : une région déjà sujette aux feux (le côté ouest de Maui), des précipitations qui ont favorisé l’abondance d’herbes mortes pendant la saison sèche, enfin des vents exceptionnellement forts exacerbés par l’ouragan Dora.

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16 réflexions au sujet de « Feux à Hawaï : comment s’expliquent les incendies exceptionnels qui ont ravagé Maui ? »

  1. Après 3 ans de niña dans les zones sèches du Pacifique, la végétation a littéralement explosé. El niño et la sécheresse qui s’est installé depuis le mois de mai font que le risque d’incendie va aller grandissant dans de nombreux endroits d’ici fin 2023. Pourtant de nombreux lieux du Pacifique connaissent actuellement un hiver austral assez froid et long. Donc rien à voir avec la chaleur, mais un risque de feu qui a tout à voir avec la végétation luxuriante de ces dernières années. Sans carburant pas de feu, cela ne brûle pas dans les déserts…
    Rappelons (ou plutôt signalons, les journaux s’étant abstenus de parler de nouvelles positives) que l’Australie a battu cette année de nombreux records historiques de récoltes agricoles.

  2. Il n’y a pas que cela pour expliquer le caractère très spécial de cet incendie. De l’avis de pompiers qui ont l’habitude de la chose, lorsque le vent est très fort et le relief peu accentué il écrase le feu au sol et crée ainsi une effet de truyère rasante. Il en résulte que la cime des arbres est épargnée et que les objets près du sol (voitures etc.) littéralement fondent. De plus le feu se propage au sol à grande vitesse, même si le combustible est raréfié. C’est sans doute la raison des nombreux morts. Difficile d’échapper.
    On voit aussi sur internet des théories totalement fumeuses, c’est le cas de la dire, sur le sujet, alors que le mécanisme est simple à comprendre.

    • Il n’en est pas moins vrai que :
      – les pompiers (ceux que l’on autorise à s’exprimer) peuvent difficilement émettre des doutes quant à certaines “curiosités” de cet incendie,
      – les limites de certaines propriétés ont été strictement (dans le sens premier du terme) épargnées,
      – des arbres, des bosquets, ont été épargnés par les flammes alors que les maisons situées parfois à moins de 10m sont totalement carbonisées (parpaing, brique, porcelaine des installations de bain…) et réduites en cendres (croyez-vous sérieusement qu’un incendie produisant une chaleur telle puisse ne pas avoir de conséquence sur un végétal situé à moins de 10m?)…
      Certains parlent d’armes (dont je ne rappelle plus le nom)… et je m’en branle!
      C’est le processus bien identifié de ridiculisation de tout questionnement (les “complotistes” sont ceux qui croient que la Terre est plate, que les reptiliens règnent sur notre monde…).
      Dans cet événement (et dans d’autres comme la crise covid, hein), il y a des choses inexplicables par la raison, le bon sens, la physique/chimie… ET vos “explications” ne me convainquent pas!

      • Mais je ne cherche pas à convaincre, seulement à trouver une explication rationnelle à des bizarreries. Des choses analogues avaient déjà été signalées pour des feux en Californie. L’effet de ”truyère rasante” que j’ai utilisé ne fonctionne pas forcément en tapis mais par couloirs juxtaposés (le vent est tourbillonnaire), ce qui expliquerait que le feu ait épargné certaines propriétés alors qu’il grillait tout à 10 m de là. Lors de feux récents sur la côte vers Martigues/Sausset (La couronne), on a vu le feu emporté par le mistral franchir allègrement de grands espaces sans végétation et aussi griller un camping alors que celui contigu était épargné.
        Sinon, on tombe dans le délire, des armes expérimentales d’agences gouvernementales, pourquoi pas des Aliens débarqués ce jour là. Si vous avez mieux…
        Je ne comprends pas très bien le sens de votre remarque.

        • j’oubliais : que le vent soit tourbillonnaire, et ses destructions organisées en couloirs, c’est connu : voir les sillons de destruction dans les forêts de l’Est de la France lors de la grande tempête de décembre 1999.

          • pour avoir des précisions supplémentaires sur de tels phénomènes très localisés taper ”burst swath” sur internet, concept développé par Fujita au début des années 80.

        • Nou sommes bien d’accord : vous ne savez pas, je ne sais pas… donc, scientifiquement parlant, toutes les options sont sur la table!
          Je vous rappellerai que, lors de la crise covid, toutes les objections des “questionnistes” étaient rejetées “scientifiquement” par les “savants”… et on sait désormais, pour ceux qui s’en donnent la peine, que tout était plus compliqué…
          Ce qu’il y a de bien avec l’esprit humain c’est, qu’avec une bonne propagande, on peut tout expliquer (même l’incendie “merde, j’ai oublié quelque chose et quand on a pas de tête faut utiliser ses jambes” ce qui explique que le feu revient sur ses pas parce qu’il a oublié de cramer une maison… eh, je déconne, hein)…

  3. Voici le lien vers la publi de Waranauskas (1985) qui fait état du concept de ”burst swath” forgé par Fujita au début des années 1980. La rafale descendante se divise en micro rotors horizontaux (donc différents des tourbillons à axe vertical comme celui des tornades). Ces micro rotors se propagent à grande vitesse avec un pouvoir destructeur élevé sur des couloirs de largeur réduite. En cas d’incendie, ils peuvent fonctionner comme des chalumeaux ou des soufflets de forge, ce qui peut expliquer qu’ils soient capables de fondre le métal des voitures alors qu’à proximité (l’air étant un bon isolant), les dégâts sont limités et la végétation épargnée.

    https://swco-ir.tdl.org/bitstream/handle/10605/262149/ttu_fujita_000066.pdf?sequence=4&isAllowed=y

  4. @ Serge Ferry et @ Madmax : Messieurs, il ne me semble pas opportun de “radicaliser” son opinion car tant l’un que l’autre, vous exprimez (fort bien d’ailleurs) vos hypothèses. A Serge Ferry, je dirais qu’il m’a appris certaines choses très intéressantes, et qui me font devenir + raisonnable dans mes hypothèses (parfois “complotistes”).
    A Madmax, je dirais que je partage son opinion pour certains incendies qui défient toutes les lois naturelles, à commencer par leurs déclenchements et/ou leurs progressions. Il se trouve qu’il existe nombreux témoignages directes, parfois avec des vidéos (se méfier certaines sont anachroniques et trompeuse… mais pas toutes) qui font état de l’intervention directe de l’homme. Le chercheur sur les plaques tectoniques et les mouvements de failles (chaine youtube “DUTCHSINSE” a de nombreuses vidéos ou des faisceaux DEW (Direct Energy Weapon) apparaissent clairement lorsque l’on prend des satellites d’imagerie infra-rouge. Ne parlons pas de ces cohortes d’activistes anti-climats qui ont été souvent arrêtés aux endroits même ou des feux “sauvages” venaient de se déclencher…
    Merci à Serge Ferry car j’ai appris beaucoup : Tuyères rasantes, burst swaths, incendies tourbilloires.
    Merci à Madmax qui défend son point de vue car il a AUSSI raison, et qu’en effet il y a eu (et il y aura encore certainement) des utilisations de DEW très documentés sur des zones d’incendies.
    Bonne journée à vous deux

    • Environ 85% des incendies de forêt ont une origine humaine accidentelle ou intentionnelle/criminelle. Supprimez l’habitat et interdisez de façon draconnienne toute circulation dans les massifs forestiers et vous réglez les 4/5 du problème.
      D’autant que les incendiaires, dont une grosse partie échappe à la Justice, “favorisent” la propagation de leurs méfaits en choisissant les moments les plus favorables pour les commettre, en général quand le vent souffle fort et à la tombée de la nuit pour compliquer la tâche des pompiers, ce qui donne une prévalence certaine des dommages causés par ces incendies criminels sur les accidentels.

      • A ce sujet, les réchauffistes et leurs courroies de transmission médiatiques manipulent l’opinion par des sous-entendus grossiers selon lesquels ce serait le changement climatique qui serait responsable de l’augmentation des sinistres par le déclenchement spontané de foyers du simple fait de l’élévation des températures. Rien n’est plus faux: Même avec des températures anormalement élevées un tas de brindilles ne peut s’enflammer sans l’intervention d’une main et d’un briquet.

  5. La cause de ses incendies, théoriques ou complotistes, sans preuve véritable, sont des assertions plausible, mais je doute qu’un jour que la lumière soit faite totalement et objectivement sur ses incendies. Mais comme pour le Canada, l’ineptie des gouvernements est la principale cause de ses incendies ou du moins de leur importance. Si les dirigeants d’Hawaï savaient que les herbes sèches étaient fortement propice à l’incendie, alors pourquoi ne pas intervenir en amont et arroser les herbes sèches et prévenir le risque d’incendie, plutôt qu’en aval et arroser le feu, laisser la panique gagner la population, ils n’ont même pas sonner l’alarme, mais à part sonner l’alarme climatique. Si des êtres malveillants sont la cause de ces feux, peu de chance que nous ne le sachions jamais. Mais les gouvernements ont-ils délibérément par économie de moyens ou par dogmatisme climatique, négliger le danger d’incendie et le “dérèglement climatique dû à l’homme” est tellement un coupable utile, pas seulement pour les gouvernements, mais les médias en raffolent aussi. La vérité sur ses évènements, ne sera pas connue de sitôt, et les allégations faites sur le sujet, toute logique qu’elles soient, sont toutes sujettes à être discrédités si la vérité objective sortait un jour!

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