Famine écologique au Sri Lanka

par Rémy Prud’homme.

Au Sri Lanka, rien ne va plus. Ce petit pays (22 millions d’habitants) n’était pourtant pas mal parti : le revenu par habitant y était traditionnellement, et reste encore, bien plus élevé qu’en Inde. Il est aujourd’hui au bord du gouffre. Le pays n’a plus de riz, plus d’essence, plus de crédit, plus de touristes, presque plus de thé. Des émeutiers affamés ont envahi le palais du président, qui s’est enfui. Le premier ministre (son frère) a aussi annoncé sa démission. Les causes de cette dégringolade tragique sont nombreuses, mais la principale est la folie écologiste.

À la fin du siècle dernier, une guerre fratricide entre la majorité cinghalaise et la minorité tamoule a affaibli le pays et écorné son image. Un clan corrompu et incompétent a accaparé le pouvoir. Pour faire la nique à son voisin indien, le Sri Lanka s’est vendu à la Chine. Le covid a écarté les touristes. La hausse des prix de l’énergie a aggravé la situation. Mais le principal coupable est la décision (en avril 2021) du président du Sri Lanka d’interdire totalement l’utilisation des engrais synthétiques.

Cette décision était inspirée et préparée par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, qui avait fait accepter une Déclaration de Colombo (signée par des pays comme le Brésil ou l’Allemagne) engageant la diminution de 50% des engrais nitriques chimiques d’ici 2030. L’Union Européenne n’est guère en reste, avec son programme « De la ferme à la fourchette » qui prévoit une diminution de 20%. Mais le président du pays hôte a voulu faire mieux. « Nous relevons, affirma-t-il, le défi de faire du Sri Lanka le premier pays du monde à éliminer complètement l’usage des engrais chimiques ». Cette mesure était l’un des piliers de son grandiose projet intitulé « Visions de Prospérité et de Splendeur ». Tous les agronomes compétents, au Sri Lanka et ailleurs, crièrent au casse-cou. Tous les militants écologistes, ailleurs plus qu’au Sri Lanka, se réjouirent. Enfin un grand pas en avant. On allait voir ce que l’on allait voir.

On a vu. L’interdiction fut effective, car les engrais synthétiques étaient importés, et qu’il est facile d’interdire des importations, surtout dans une île. Les conséquences furent immédiates et terribles. Dès l’hiver 2021, la production agricole avait diminué de 40 à 50%. Les superficies ensemencées se réduisaient comme peau de chagrin. Le gouvernement srilankais acheta en urgence (et fort cher) à la Chine des engrais organiques. Hélas, ils étaient pleins de bactéries nocives. Le président finit par manger son chapeau, et par revenir, au moins en partie (pour les plantations de thé notamment), sur son interdiction. Mais il était trop tard : les pénuries étaient là, et dans un pays largement agricole, elles se propageaient à l’ensemble de l’économie. Pas d’engrais, pas de thé, pas de riz, pas de tout – et beaucoup de misère et de colère.

L’interdiction des engrais au nom de l’écologie sur le territoire du Sri Lanka a constitué une expérience grandeur nature. Elle a montré que le terrible enfer des réalités est pavé des bonnes intentions des idéologies. Ce sont hélas les paysans pauvres qui payent les pots cassés. L’un des grands succès du XXe siècle a été, pour la première fois dans l’histoire du monde, l’élimination des famines – à l’exception des famines causées par les guerres civiles ou internationales. Faudra-t-il y ajouter une autre exception : les famines causées par les folles lubies écologistes ?

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9 réflexions au sujet de « Famine écologique au Sri Lanka »

  1. Alors là, BRAVO pour cet article!!!!….jamais nos médias televisés ne parleront d’une telle catastrophe….les srilankais peuvent dire merci aux écolos

  2. Bonjour,

    cet article est intéressant et fort bien écrit, on se laisse emporter par lui comme par une histoire bien contée.

    Je regrette cependant la multiplication des partis pris engagés et non justifiés. Il faudrait accepter de vous croire sur parole. Or, il me semblait que c’était la raison d’être de ce site que d’objectiver un regard différent sur les réalités climatiques d’aujourd’hui. Cet article tend plutôt à illustrer une prise de position alternative dont l’objectivité n’est pas mieux démontrée.

    Je reste dans l’espoir de lire ici des contenus mieux argumentés et sourcés que ceux qui relèvent de la pensée “main stream” sur le sujet.

    Bien à vous,

    • Il me semble que la pensée “main stream” c’est le discours écologique. On nous rebat les oreilles depuis quelques semaines avec la canicule liée au changement climatique par la faute des humains.

      • Bonjour,

        Je ne porte pas une version des faits propre car je ne connais pas assez l’histoire du Sri Lanka. Vous souhaitez juger ? De mon côté, cela ne m’intéresse guère, ce qui compte pour moi est l’information objective.

        Or, ce site revendique apporter de l’objectivité sur la question climatique et cet article, comme d’autres, est un simple amoncèlement de partis pris anti-écologiques. Une histoire, aussi bien contée soit-elle, n’est pas un argument et ne fait pas avancer une réflexion rationnelle. En l’état, le propos tenu ici est donc nul et non avenu.

        Bien à vous,

        Mélanie

  3. Votre article est un parti pris anti écologiste qui ne cite aucune source d’ailleurs. La principale cause de la dégringolade est la corruption du clan rajapaksa, détournement de fonds, achat de propriétés partout dans le monde, dépendance du remboursement de la dette avec de nombreux pays en particulier la chine. Du fait du manque de devise, le président avait fait le choix de se passer des engrais chimiques plus chers pour favoriser le compost chinois, qui s’est révélé plein de bactéries nocives après expertises, le débat écologique était un faux prétexte.

    La dépendance aux multinationales, autre problème majeur, que ce soit dans la confection, le tourisme…Ce pays a énormément de ressources, il doit apprendre à les gérer de manière autonome sans créer de dettes à rembourser. Malheureusement, le gouvernement en place après démission du président, prône lui-aussi le FMI, au lieu de chercher l’autonomie du pays, en développant les énergies renouvelables, la permaculture, le compost, etc, qui sont pourtant les revendications du mouvement de protestation qui a permis de faire démissionner le président.

    Est-ce que les élections présidentielles dans quelques mois permettront de faire élire ce nouveau mouvement de coalition dit “violet” équivalent de l’extrême gauche en france, qui prône ce renouveau?

    De même les famines actuelles sont liées au manque de devise pour acheter du pétrole, plus de transport local, prix augmentés encore plus qu’en france, impossible de se nourrir pour une population avec un revenu moyen de quelques centaines d’euros.

    PS: j’espère que les autres articles sont plus “réalistes” et surtout moins réinformés. Merci

    voir les nombreux articles en anglais parus dans la presse locale sri lankaise à propose du compost chinois bactéricide.

  4. Et voilà. Pan sur le bec !
    La question de fond reste: l’humanité en croissance peut-elle se passer d’une agriculture intensive à hauts rendements (avec les nuisances réelles ou supposées qui vont avec) ? Personnellement j’en doute mais la question reste ouverte. Seul un essai grandeur nature mettrait tout le monde d’accord, au risque d’une catastrophe ( et quand j’écris catastrophe cela ne concerne pas la planète qui s’en sortira toujours mais l’humanité).
    Mais utiliser le Sri Lanka, ce timbre-poste géographique, pour le démontrer est éminemment casse-figure, tant la politique locale interfère avec la question de fond. En tout cas, il était prévisible que des voix discordantes de lecteurs se fassent entendre.

  5. Le non achat d’engrais efficaces et leur remplacement par des produits dangereux et écologiquement correct a été accompagné du discours qui allait bien pour se cacher derrière des prétextes à la mode. Dans la pratique, ce renoncement me fait penser à la fable de Lafontaine ” ils sont trop verts et bon pour des goujats”.
    Ceci noté, le pays avait jusqu’à ces dernières années, un revenu moyen par habitant comparable à l’Ukraine et un indice de Gini comparable à celui du Maroc, donc pas très riche, mais pas pauvre. Tout ça s’est effondré sur les dernières années, en particulier semble-t-il, suite à la diminution des recettes touristiques.
    Je vous invite à regarder les données de la Banque Mondiale.
    Quant au modèle Bouthanais, n’oublions pas que ce petit pays vit largement de la rente hydroélectrique à destination de l’Inde et d’une taxe de 100 $ journalier par (rare) touriste…
    Moralité,
    Quand on vend quelque chose d’indispensable (l’énergie par exemple), on reste riche,
    Quand on vend du superflu on reste pauvre.
    Solution (des marchands de smartphone ou d’éoliennes par exemple), rendre le superflu indispensable…

  6. N’importe quelle personne sensée peut comprendre la folie de supprimer un intrant sans préparation, alors que ce changement doit se faire dans la durée, en revivifiant les sols, bref, en nourrissant la vie du sol, car les sols exploités industriellement sont morts et ont bien besoin des intrants. C’était du suicide. Cela par-dessus la folie covidiste du gouvernement à la botte des mafieux supranationaux qui ont imposé des mesures irrationnelles et destructrices à quasiment toute la planète, au mépris même du règlement sanitaire international : ne pas fermer l’économie, protéger les personnes fragiles, ne pas faire peur.
    Ils ont détruit le tourisme et le coupable n’est pas le covid, mais les mesures imposées. Il faut appeler un chat un chat.
    Maintenant le FMI et les mafieux derrière peuvent encore plus tenir ce pauvre pays par la dette.

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