À propos du record de chaleur enregistré en Sibérie le 20 juin 2020

Samedi 21 juin une température de 38 °C a été relevée à Verkhoïansk, une ville de Sibérie d’environ 1300 habitants située dans la République de Sakha à 4 675 km de Moscou. L’événement a déclenché une tempête médiatique. Le Monde, donnant le ton, a titré : « chaleur record en Sibérie : 38 °C au-delà du cercle arctique ! ».

La carte ci-dessous (figure 1) montre la situation pour la ville de Verkhoïansk et l’ensemble de la Sibérie au 20 juin 2020 (la zone de Verkhoïansk, est cerclée).

Figure 1 : Températures enregistrées en Sibérie le 20 juin 2020 (Source severe-weather.eu)

Les régions situées au nord du cercle arctique n’ont pas nécessairement un climat polaire.

Verkhoïansk se situe à 67° de latitude donc au Nord du cercle arctique (66° 33′ 47,445″ de latitude Nord). Mais cela ne veut pas dire que le climat y soit nécessairement polaire. Malgré une croyance répandue, les vagues de chaleur dans les régions au Nord du cercle polaire ne sont pas exceptionnelles. Les variations annuelles de température y sont très importantes et les vagues de chaleur brèves mais marquées ne sont pas rares.

Le climat polaire est caractérisé par des températures froides toute l’année, sans chaleur estivale et avec des hivers glaciaux. Les températures moyennes du mois le plus chaud ne sont jamais supérieures à 10 °C, ce qui correspond à la limite de la présence des arbres. Compte tenu des fortes discontinuités géographiques (continents, montagnes, océans et mers) dans l’hémisphère nord, cet isotherme de +10°C présente un tracé très irrégulier. À l’évidence, Verkhoïansk bien que situé au Nord du cercle arctique n’a pas un climat polaire qui pourrait rendre ce record de température alarmant.

Cette région de la Sibérie connaît des alternances d’étés très chaud et d’hivers très froid.

La région dans laquelle se trouve Verkhoïansk connaît un climat hypercontinental où il peut faire très chaud l’été et très froid en hiver. Ainsi Verkhoïansk est réputée pour être le point le plus froid de l’hémisphère Nord (avec un record à -69,8 °C.). La moyenne des maximales du mois de juillet est de 23 °C, mais Il n’est pas rare ‘selon Météo France d’y mesurer de températures supérieures à 30 °C. Le précédent record de température pour Verkhoïansk était de 37,3 ° C en juillet 1988. 

Commentant ce record de chaleur en Sibérie, Antony Watt rappelle que cette région est dominée une grande partie de l’année par des hautes pressions qui la coupe des influences du réchauffement en hiver et qui , associées à un manque de couverture nuageuse, entraînent un froid intense pendant les mois les plus froids. En été, c’est l’inverse qui se produit, conduisant à des températures excessivement élevées.

Dans ce même article Antony Watt indique que Fort Yukon, qui est également au- dessus du cercle polaire arctique a connu un record de température de 100 degrés Fahrenheit (37,78 °C) le 27 juin 1915 selon les documents officiels du National Weather Service dont les enregistrements remontent à 1904.

Une anomalie de +0,8 C pour l’hémisphère Nord.

La carte du monde ci-dessous (Figure 2) permet de visualiser les anomalies de température (écart par rapport à la moyenne 1979-2010) le 22 juin 2020, à 2 mètres du sol pour l’hémisphère Nord.

On y voit une zone très chaude en Sibérie. Mais on y voit aussi d’autres régions du Monde marquées par des anomalies négatives, de sorte que l’anomalie moyenne pour l’hémisphère Nord n’était ce jour là que de 0,8°C.

Figure 2. Anomalies de températures le 22 juin 2020 pour l’hémisphère nord à 2 mètres d’altitude. (Source severe-weather.eu)

Les températures sont revenues à des valeurs normales

Si l’on regarde maintenant les prévisions météorologiques à Verkhoïansk pour la semaine du 1 au 8 juillet, on voit des températures maximales s’étageant entre 9°C et 27°C.

Figure 3 : prévisions météorologiques pour Verkhoïansk (Sakha, Russie). Source weather-forcast

Que conclure ?

La Sibérie est une vaste région dont une grande partie est peu observée, ce qui signifie qu’il existe peu de données directes sur les températures. Même s’il est admis que la Sibérie se réchauffe plus rapidement que la moyenne de la planète, la surréaction des médias à un événement météorologique isolé montre à quel point un débat rationnel sur le changement climatique devient au fil des années plus difficile.

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