Arthur Corentin
2025 est l’année des 150 ans de la création du Bureau International des Poids et Mesures ou BIPM. Le BIPM est un organisme international historiquement basé à Sèvre, à la suite de la signature, par 17 états, de la « Convention du mètre ». Les 150 ans de cette convention ont été fêtés le 25 mai 2025 au siège de l’Unesco à Paris. Il y a 150 ans, le rayonnement du génie français en sciences et techniques pouvait irradier la planète, au point que la langue officielle de la métrologie est le français. Mais, les temps ont bien changé…
Que vient faire l’Unesco dans cette histoire ? L’idée de la convention du mètre était de construire un socle commun, des étalons universels et des procédures pour raccorder les mesures faites à travers le monde à ces étalons. En 1875, la devise du BIPM fut gravée sur des pièces fabriquées pour l’occasion : « Des mesures « à tous les temps, à tous les peuples ». La métrologie est alors devenue un symbole de l’union des peuples, que l’Unesco a pris en exemple.
La métrologie est, à l’origine, essentiellement destinée aux grandeurs physiques de base : longueur, masse, temps, température… que les métrologues définissent depuis 2018 par rapport à des constantes physiques fondamentales, pour tendre un peu plus vers l’universel. Cependant, avec l’évolution des besoins scientifiques, commerciaux et sociétaux, elle s’est ouverte progressivement à d’autres domaines : chimie, biomédical et, compte tenu de l’importance de certaines politiques, elle s’est ouverte dernièrement à la « préservation de l’environnement ».
Qui dit environnement dit climat, et à la fin des années 2000, le BIPM a cherché à se rapprocher d’organismes compétents, qui pourraient le guider dans les actions à développer. En 2010, un accord a été conclus avec l’OMM, l’Organisation Météorologique Mondiale, qui est devenu la seconde organisation intergouvernementale à rejoindre le Comité International des Poids et Mesures (1), instance qui guide les travaux que le BIPM doit mettre en place. L’OMM est une institution des Nations Unies qui, selon son site, « fait autorité pour tout ce qui concerne l’état et l’évolution de l’atmosphère terrestre ». Le BIPM ne pouvait donc pas mieux tomber, dans tous les sens du terme. L’OMM est, avec le Programme des Nations Unies pour l’Environnement ou PNUE, à l’origine de la création du GIEC.
En 2022, le BIPM a organisé une conférence commune avec le WMO portant sur « Le rôle de la métrologie dans la lutte contre le réchauffement climatique ». Valérie Masson Delmotte était venue en personne, comme représentante du GIEC, rappeler les prédictions apocalyptiques de cet organisme, « si l’on ne fait rien pour lutter contre le réchauffement climatique ».
Lors de la cérémonie du 25 mai 2025, le WMO avait dépêché Oksana Tarasova sa représentante, chargée de mission scientifique pour le développement de la veille mondiale sur les gaz à effet de serre. Durant sa session, celle-ci a fait, comme il se doit, la promotion du développement d’un réseau mondial de surveillance des gaz à effets de serre, devant une assemblée internationale, multiculturelle et composée de métrologues imminents venant de presque tous les pays de la planète. Rien sur les nuages, la vapeur d’eau, les océans, les flux de rayons cosmiques et les grandeurs et techniques qui s’y rapportent. Rien non plus pour distinguer les sources d’émissions. Peuples-là, celui de la fête des 150 ans de l’union des peuples autour de références communes, seul le dogme sur les gaz à effet de serre avait sa place. Quelle tristesse pour ceux, peu nombreux dans la salle, qui ont une autre vision des choses.
Pour être juste, complet et quelque peu optimiste, si le réseau mondial de surveillance des gaz à effet de serre occupe une place centrale et beaucoup de subventions, il faut toutefois souligner que l’atelier de 2022 avait laissé la porte ouverte au reste des variables à surveiller. Il a fait l’objet d’un rapport que l’on peut trouver en ligne (2). En septembre 2024, une autre conférence a été organisée par le BIPM pour faire le point sur les actions engagées (3). Le CO2 et les gaz à effet de serre y tiennent encore une place très (trop) importante (6 sessions sur 13), mais on y a aussi parlé de la métrologie des températures aériennes et marines, de la traçabilité des mesures du pH de l’eau de mer, de la traçabilité des mesures de température faites par les satellites, des liens entre les paramètres atmosphériques et les flux de rayons cosmiques, des techniques neutroniques pour l’étude du permafrost ou des problèmes métrologiques posés par la mesure de la couverture neigeuse.
La devise du BIPM est-elle respectée concernant la question climatique ? Je vous laisse juge.
Sources :
