Comprendre l’incroyable écologie

Qui se souvient encore du « développement durable » ? Cette expression fétiche des années 2000, mot de passe obligé de toutes les politiques publiques et des discours enflammés pour protéger la planète, a disparu des radars sans laisser de trace. Tâchant de marier croissance économique et préservation de l’environnement, le concept était en quelque sorte un bouclier face aux coups de boutoir d’un écologisme qui, déjà, voulait combattre au nom de la planète l’idée même de croissance. La défaite du « développement durable » n’a pas été que sémantique, le changement des mots à la mode n’étant le plus souvent qu’un moyen de repérer une guerre d’idées, voire de vision du monde.

Dans Comprendre l’incroyable écologie (Salvator, 2025), Bertrand Alliot explore le cheminement de l’idéologie écologiste au sein de nos sociétés pour en révéler les ressorts. Pour lui, la question climatique n’est pas un défi mais un récit, dont l’extraordinaire succès tient à des causes bien, spécifiques et bien éloignées de la science. Habile à marier les contraires, l’alarmisme climatique tâche de créer chez chacun un « réflexe de survie » en faveur de mesures drastiques pour limiter les émissions de CO2 tout en devant faire face à l’absence d’événement un tant soit peu démonstratif de la crise, les divers faits divers météorologiques et catastrophes naturelles en tout genre ne suffisant pas à convaincre en profondeur de la nécessité d’actions radicales. Nous vivons ainsi une « drôle de guerre », où la crainte est là mais ne suscite pas l’action. Les effets les plus grands sont encore ceux que l’alarmisme climatique suscite sur les idéologies, principalement de gauche mais pas seulement. Or « une crise véritable ne devrait susciter aucune idéologie, seulement une réaction ».

En tant que spécialiste de la biodiversité, Alliot voit dans ce nouveau mot de la sphère militante écologiste la possibilité d’un passage de relai entre une peur climatique finissante et la nécessité de donner aux craintes écologistes une nouvelle jeunesse. Mais Alliot souligne que, de plus en plus tiraillé par ses contradictions, le récit écologiste ne pourra en réalité plus durer bien longtemps, et que la « Sixième Extinction des espèces » a peu de chances de faire mouche, même en imitant les recettes qui ont fait le succès de la « crise climatique ». Condamnés à la radicalisation pour survivre, ses adeptes se coupent de plus en plus de la masse des gens qui, bien que sponténémant bienveillants à l’égard du discours pour la planète, s’en détournent de plus en plus à mesure qu’augmente la liste des sacrifices exigés par la nouvelle religion séculière.

Bertrand Alliot, Comprendre l’incroyable écologie (Salvator, 2025), .

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